Dans une longue lettre adressée le 21 septembre dernier aux membres du synode sur la synodalité, et rendue partiellement publique par The Pillar, le cardinal Zen – lui qui a subi les affres de la Chine communiste – met en garde contre l’opération de « manipulation » en cours. Il avertit que loin d’attendre les « surprises » du bon Dieu, les organisateurs – on pourrait les qualifier, à la manière de Jean Madiran évoquant ceux qui tirent les ficelles dans les conférences épiscopales, de « noyau dirigeant » – ont déjà tout… ficelé.
Maike Hickson publiait hier sur LifeSiteNews son analyse de cette lettre et de ces avertissements, en citant son défunt mari qui dénonçait avec beaucoup de pertinence le « centralisme démocratique » propre aux entreprises révolutionnaires, soulignant que ce sont des méthodes communistes qui sont actuellement mises en œuvre à Rome.
Par le synode sur la synodalité, Rome prétend aujourd’hui mettre l’Eglise « à l’écoute » : à l’écoute de la base, élargie à toutes les catégories de la population, y compris les athées et ceux qui se revendiquent « LGBT ». C’est l’entrée de la démocratie dans l’Eglise, mais d’une démocratie elle-même travestie, puisqu’il s’agit en quelque sorte d’un outil d’illusionniste servant à faire prendre par « tous » des décisions prédéfinies par un petit nombre.
Rappelons que le cardinal Zen fait partie des cinq cardinaux qui ont soumis au pape deux séries de dubia au sujet de propositions que l’on entend de plus en plus qui contredisent l’enseignement pérenne de l’Eglise.
Je vous propose ci-dessous la traduction de l’article de Maike Hickson. – J.S.
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La lettre du cardinal Zen montre que le synode est mené selon une tactique communiste
On apprenait le 4 octobre que le cardinal Joseph Zen, ce prélat chinois qui s’est opposé toute sa vie à l’oppression du communisme chinois, a écrit une lettre aux évêques participant au synode sur la synodalité, qui s’est ouvert hier à Rome, les appelant à résister à un « plan de manipulation ».
Datée du 21 septembre, la lettre de l’évêque émérite de Hong Kong, âgé de 91 ans, exprime une profonde inquiétude quant aux intentions cachées de l’ensemble du synode, qui s’opposent à la doctrine de l’Eglise.
« Ils [les organisateurs du synode] commencent par dire que nous devons écouter tout le monde », écrit-il, selon The Pillar. « Peu à peu, ils nous font comprendre que parmi ces “tous” se trouvent être ceux que nous avons “exclus”. En fin de compte, on comprend qu’il s’agit de personnes qui optent pour une morale sexuelle autre que celle qu’enseigne la tradition catholique. »
« Ils prétendent souvent ne pas avoir de programme », a ajouté le cardinal Zen, « mais c’est vraiment faire offense à notre intelligence. N’importe qui peut voir quelles sont les conclusions vers lesquelles ils tendent ».
Etant donné que The Pillar, qui a révélé l’affaire, n’a pas publié l’intégralité de cette lettre de six pages, nous nous appuyons ici sur leurs propos, détaillant la perception de Zen selon laquelle les organisateurs tentent d’établir un système démocratique dans l’Eglise, ce qui va à l’encontre de la structure hiérarchique de l’Eglise telle qu’établie par le Christ Lui-même. The Pillar écrit :
« Dans ce texte de six pages, le cardinal Zen fait aussi part de sa “confusion et son inquiétude encore plus grandes” face à ce qu’il considère comme un effort concerté pour utiliser le synode afin d’établir la démocratie à la place de la hiérarchie sacramentelle de l’Eglise, en tant que moyen permettant d’établir la doctrine.
« Le cardinal avoue avoir le “soupçon malveillant” selon lequel le processus synodal, qui devait à l’origine se terminer après une seule session à Rome en octobre, a été prolongé d’une année supplémentaire parce que “les organisateurs, qui ne sont pas sûrs de pouvoir atteindre leurs objectifs au cours de cette session, ont préféré disposer de plus de temps pour manœuvrer”. »
Pour le prélat chinois, il est clair que les conclusions de ce synode sont déjà prêtes. The Pillar rapporte ainsi ses propos : « Les participants ont été invités à “s’attendre à des ‘surprises’ de la part de l’Esprit” ; cette formulation semble impliquer une issue prédéterminée du Synode. « Il est évident qu’ils sont déjà informés des surprises auxquelles il faut s’attendre », affirme Zen. Celui-ci estime que les petits groupes linguistiques au sein desquels les thèmes du Synode sont discutés ont pour but d’aider à manipuler des résultats du Synode. A ses yeux, le personnel du secrétariat synodal est « passé-maître dans l’art de la manipulation », et il a donc exhorté les participants au Synode à « ne pas leur obéir » lorsqu’ils leur « disent d’aller prier, interrompant ainsi les sessions du Synode ».
Dans cette lettre du 21 septembre, Zen a également fait remarquer le parallèle qui existe avec le chemin synodal allemand, qui proposait « un changement révolutionnaire dans la constitution de l’Eglise et dans l’enseignement moral sur la sexualité », et auquel le pape lui-même n’a jamais mis fin.
La manipulation communiste du synode : la « Révolution d’Octobre de l’Eglise communiste »
Autrement dit, Zen, se fondant sur son expérience des tactiques communistes chinoises, a reconnu des méthodes qui se prétendent démocratiques, mais qui sont en réalité manipulatrices et révolutionnaires, tout comme celles du communisme. Le prêtre allemand Frank Unterhalt, dans sa nouvelle analyse du Synode, a quant à lui parlé de « Révolution d’Octobre de l’Eglise catholique ».
Cette méthode peut être décrite comme le « centralisme démocratique ». De l’extérieur, elle ressemble à une démocratie, mais elle est en réalité dirigée par un petit groupe de personnes, par une sorte de « comité central ». En observant le Synode sur la synodalité en cours, on constate que c’est exactement ce qui se passe : le groupe d’organisateurs à cinq têtes – le comité central – est composé de personnes qui souhaitent modifier la doctrine de l’Eglise sur les questions LGBT et sur les « ordinations » des femmes. Avec le soutien et la connivence du pape lui-même, ils dirigent les discussions et les résultats, et ceux qui tentent de s’opposer à ces changements sont réduits au silence ou exclus.
De fait, LifeSite a appris d’une certaine source que le document provisoire du synode circule déjà depuis plus de deux mois.
A la lumière de ces développements si néfastes pour les fidèles et pour l’Eglise catholique, une réflexion sur le « Centralisme démocratique dans l’Eglise catholique », écrite par mon mari récemment décédé, le Dr Robert Hickson, mérite d’être évoquée. Il l’avait rédigée dans le contexte du Synode des évêques sur la famille de 2015, au cours duquel on avait à l’époque déjà découvert tant de méthodes de manipulation, avec le concours décisif du cardinal Lorenzo Baldisseri, alors secrétaire général du Synode des évêques. Mon mari s’exprimait en ces termes : « Les principes de Baldissieri et ses méthodes appliquées de manière ambiguë, tout cela avec l’approbation du pape, me rappellent de manière incontestable les changements manipulateurs et les équivoques propres à la praxis d’un concept important et récurrent : le “centralisme démocratique”, concept et réalité propres aux communistes soviétiques et chinois. »
Et il s’interrogeait encore : « Dans quelle mesure cette tromperie dans les procédures et la rupture de confiance qui en découle se répandent-elles dans l’Eglise catholique “actualisée”, occupée par les néo-modernistes, en particulier sous la forme d’un “centralisme démocratique” trompeur ? »
Plus loin, mon mari expliquait qu’avec cette « méthode d’organisation communiste, on peut avoir l’illusion d’une procédure démocratique “participative” alors qu’en réalité, tout le processus est organisé et dirigé par un petit groupe de personnes ». Cette méthode, soulignait-il, se constatait aussi dans la Révolution française.