Les cardinaux Burke, Sarah, Zen, Sandoval et Brandmüller présentent des “dubia” au pape et interpellent les laïcs

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Les cardinaux Brandmüller, Burke, Sandoval, Sarah et Zen


Honneur aux cardinaux Walter Brandmüller, Raymond Leo Burke, Juan Sandoval Iñiguez, Robert Sarah et Joseph Zen Ze-Kiun ! Ces cinq princes de l’Eglise dont la position éminente dans la hiérarchie ecclésiastique leur confère la lourde responsabilité de conseiller le souverain pontife et les engage à verser leur sang, s’il le faut, pour la défense de la foi, ont présenté au pape François le 10 juillet dernier cinq « dubia », qu’ils rendent publics ce jour en appelant les laïcs fidèles à en prendre connaissance et à prier pour l’Eglise. Ils y mettent en exergue les tendances les plus discutables qui se dessinent parmi nombre de participants ou d’agitateurs ecclésiastiques, cardinaux et évêques y compris, qui réclament des changements impossibles sans se voir rappeler à l’ordre.

Leur démarche, qui s’est complétée d’une reformulation des dubia parce qu’une première réponse du pape, adressée de manière privée à deux des signataires (on en saisit partiellement la teneur dans le texte de la reformulation), n’avait pas fait la clarté comme l’exige la formule, est la manifestation d’un grand souci de l’Eglise partagé par cinq cardinaux. Non seulement ils ont dû en discuter ensemble, mais ils se sont mis d’accord sur des idées, des mots, et pour tout dire des questions montrant à quel point ils jugent la situation actuelle grave. Leur approche concertée est ainsi un signe d’espérance. Des membres éminents de la hiérarchie, parmi lesquels deux cardinaux électeurs, Burke et Sarah, sont prêts à se dresser pour défendre la foi.

Leur démarche rappelle la soumission, en 2016, de cinq dubia par quatre cardinaux – les cardinaux Burke et Brandmüller, que l’on retrouve ici, et les cardinaux Meisner et Caffarra, décédés depuis – après la publication d’Amoris laetitia, et l’ouverture à l’accès à la communion pour les divorcés engagés dans une nouvelle union civile alors que leur mariage était valide. Ces questions n’avaient pas reçu la moindre réponse.

Ce n’eût pourtant pas été bien compliqué pour le pape de réagir : le dubium est une question formelle posée par un prélat au Saint-Siège, appelant une réponse par « oui » ou par « non », sans argumentation théologique. Absence de réponse en 2016, réponse ne respectant pas les règles des dubia en 2023 : décidément, c’est la confusion qui demeure le maître mot de ce pontificat.

Cette fois, c’est sur des points essentiels que portent les questions des cardinaux, des questions plus fondamentales et potentiellement plus graves qu’en 2016 car il s’agit de réagir à un état d’esprit révolutionnaire qui s’est installé parmi les cercles apparemment les plus écoutés et les plus influents au synode au sujet de la nature même de l’Eglise.

Comme le montrent les dubia des cardinaux Burke, Brandmüller, Sandoval, Sarah et Zen, il s’agit de points majeurs qui ne souffrent en réalité aucune discussion.

J’ai publié, avec l’aimable autorisation du cardinal Burke, les deux versions successives avec en exergue une « notification aux fidèles » signée à la date du 2 octobre par les cinq cardinaux à la veille de l’ouverture de la première étape du synode sur la synodalité.

Il faut bien comprendre en effet que les questions posées par les cardinaux sont des appels à redire sans détours l’enseignement de l’Eglise du Christ, et qu’elles résument en quelque sorte les plus graves des dérives doctrinales de prélats progressistes. Ces derniers mois, la dénonciation de ces dérives s’est faite plus audible : en demandant au pape un simple rappel de l’enseignement de l’Eglise, les dubia mettent le Saint-Père en mesure de « confirmer ses frères dans la foi » et cela ne saurait être interprété comme une manière de le mettre en porte-à-faux.

Ces points, on les connaît, vu l’effervescence qui les entoure depuis des mois. Il s’agit au premier chef de la volonté, exprimée par certains, de procéder à une « réinterprétation » de la Révélation en fonction des changements culturels de notre temps.

Ou encore – blasphème inouï – de la possibilité de bénir les couples homosexuels, affirmée par exemple par Mgr Heiner Koch, archevêque de Berlin, qui déclarait fin août qu’il ne sanctionnerait pas les prêtres de son diocèse qui procéderaient à de telles bénédictions.

La question de la synodalité présentée comme « dimension constitutive de l’Eglise » est également posée : n’est-on pas en train de transformer un organe consultatif du pape, le synode des évêques, en autorité à part entière ?

On peut ajouter ici en parenthèse la remarque récente du cardinal Müller : « Les évêques participent à leur charge en exerçant une responsabilité collégiale pour toute l’Eglise avec le Pape. Si les laïcs y participent avec le droit de vote, il ne s’agit plus d’un synode d’évêques ou d’une conférence ecclésiastique, puisqu’il n’y a pas l’autorité d’enseignement apostolique du collège épiscopal. »

Ce qui montre bien, et il faudra le dire et le répéter, que ceci n’est pas un synode !

Le 4e dubium porte sur l’affirmation de certains pasteurs et théologiens selon laquelle la « théologie de l’Eglise a changé », de telle sorte qu’au vu des circonstances actuelles on pourrait conférer l’ordination sacerdotale aux femmes – ainsi l’a déclaré récemment l’évêque suisse Mgr Fémix Gmür, président de la conférence épiscopale helvétique.

Le 5e des dubia, enfin, porte sur l’insistance du pape quant au devoir pour le prêtre qui confesse d’absoudre sacramentellement « tout le monde, toujours », sans exiger la contrition (ni, par conséquent, l’intention de ne plus pécher).

Dans tous les cas, les cinq cardinaux rappellent les sources de la doctrine clairement établie de l’Eglise en ces matières.

Dans la deuxième version, adressée au pape François le 21 août dernier et restée sans réponse à ce jour, les cardinaux Brandmüller, Burke, Sandoval, Sarah et Zen précisent la portée de leurs questions et les reformulent de manière plus resserrée, plus vive.

Voici donc ci-dessous la « Notification » des cardinaux aux « fidèles du Christ », suivie des deux versions successives des dubia.

 

Jeanne Smits

 

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Notification aux fidèles du Christ (can. 212 § 3) au sujet des “Dubia” soumis au Pape François

 

Chers frères et sœurs dans le Christ,

Nous, membres du Sacré Collège des Cardinaux, en vertu du devoir de tous les fidèles « de donner aux Pasteurs sacrés leur opinion sur ce qui touche le bien de l’Eglise » (can. 212 § 3), et surtout en vertu de la responsabilité incombant aux Cardinaux d’assister « le Pontife Romain… individuellement… surtout dans le soin quotidien de l’Eglise tout entière » (can. 349), au vu de diverses déclarations de prélats haut placés se rapportant à la célébration du prochain Synode des Evêques, déclarations ouvertement contraires à la doctrine et à la discipline constantes de l’Eglise, et qui ont engendré et continuent d’engendrer parmi les fidèles et les autres personnes de bonne volonté une grande confusion ainsi que la chute dans l’erreur, nous avons manifesté au Pontife romain notre très profonde préoccupation. Par notre lettre du 10 juillet 2023, recourant à la pratique éprouvée de la soumission de dubia [questions] à un supérieur pour donner à ce dernier l’occasion de clarifier, par ses responsa [réponses], la doctrine et la discipline de l’Eglise, nous avons soumis cinq dubia au pape François, dont une copie est jointe [ci-dessous]. Le pape François y a répondu par lettre du 11 juillet 2023.

Ayant étudié sa lettre qui ne suivait pas la pratique habituelle des responsa ad dubia [réponses aux questions], nous avons reformulé les dubia pour obtenir une réponse claire fondée sur la doctrine et la discipline pérennes de l’Eglise. Par notre lettre du 21 août 2023, nous avons soumis au Pontife romain les dubia reformulés, dont une copie est jointe en annexe. A ce jour, nous n’avons pas reçu de réponse à ces dubia reformulés.

Etant donné la gravité de la matière de ces dubia, et spécialement en raison de l’imminence de la session du Synode des Evêques mentionnée plus haut, nous estimons qu’il est de notre devoir de vous informer, vous les fidèles (can. 212 § 3), afin que vous ne soyez pas sujets à la confusion, à l’erreur et au découragement, mais que vous puissiez prier pour l’Eglise universelle et, en particulier, pour le Pontife romain, afin que l’Evangile soit enseigné avec toujours plus de clarté, et suivi avec une fidélité toujours croissante.

Bien vôtres dans le Christ,

 

Walter Cardinal Brandmüller

Raymond Leo Cardinal Burke

Juan Cardinal Sandoval Íñiguez

Robert Cardinal Sarah

Joseph Cardinal Zen Ze-kiun

 

Rome, le 2 Octobre 2023

 

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Première formulation des “Dubia” adressés au pape François

 

1. Dubium à propos de l’affirmation selon laquelle nous devons réinterpréter la Révélation divine en fonction des changements culturels et anthropologiques à la mode.

A la suite des déclarations de certains évêques, ni corrigées, ni rétractées, il est demandé si, dans l’Eglise, la Révélation divine doit être réinterprétée en fonction des changements culturels de notre temps et de la nouvelle vision anthropologique que ces changements favorisent ; ou si la Révélation divine lie pour toujours, est immuable et ne peut donc être contredite, comme l’affirme l’enseignement du Concile Vatican II selon lequel à Dieu qui révèle est due l’obéissance de la foi (Dei Verbum 5) ; que ce qui est révélé pour le salut de tous doit demeurer « toujours en son intégrité » et transmis « à toutes les générations » (7) ; et que le progrès de la compréhension n’implique aucun changement dans la vérité des choses et des mots, parce que la foi « leur a été une fois pour toutes transmise » (8), et que le Magistère n’est pas supérieur à la Parole de Dieu, mais qu’il enseigne seulement ce qui a été transmis (10).

 

2. Dubium à propos de l’affirmation selon laquelle la pratique généralisée de la bénédiction des unions homosexuelles serait en accord avec la Révélation et le Magistère (CEC 2357).

Selon la Révélation divine, confirmée par l’Ecriture Sainte, que l’Eglise « par mandat de Dieu, avec l’assistance de l’Esprit Saint, (…) écoute (…) avec amour, (elle) la garde saintement et l’expose aussi avec fidélité » (Dei Verbum 10) : « Au commencement », Dieu créa l’homme à son image, homme et femme il les créa, et les bénit pour qu’ils soient féconds (cf. Gn I, 27-28), et l’apôtre Paul enseigne que la négation de la différence sexuelle est la conséquence de la négation du Créateur (Rm I, 24-32). Il est demandé : l’Eglise peut-elle déroger à ce « principe », en le considérant, contrairement à ce qu’enseignait Veritatis Splendor 103, comme un simple idéal, et en acceptant comme un « bien possible » des situations objectivement peccamineuses, telles les unions homosexuelles, sans trahir la doctrine révélée ?

 

3. Dubium à propos de l’affirmation selon laquelle la synodalité est une « dimension constitutive de l’Eglise » (Constitution apostolique Episcopalis Communio 6), de sorte que l’Eglise serait, par sa nature même, synodale.

Etant donné que le Synode des évêques ne représente pas le Collège des évêques, n’étant qu’un organe consultatif du Pape, et que les évêques, en tant que témoins de la foi, ne peuvent pas déléguer leur confession de la vérité, il est demandé si la synodalité peut être le critère régulateur suprême du gouvernement permanent de l’Eglise sans altérer l’ordre constitutif voulu par son Fondateur, selon lequel l’autorité suprême et plénière de l’Eglise est exercée à la fois par le Pape en vertu de sa charge et par le Collège des évêques en union avec son chef le Pontife romain (Lumen Gentium 22).

 

4. Dubium à propos du soutien apporté par des pasteurs et des théologiens à la théorie selon laquelle « la théologie de l’Eglise a changé » et que, par conséquent, l’ordination sacerdotale peut être conférée à des femmes.

A la suite des déclarations de certains prélats, ni corrigées, ni rétractées, selon lesquelles la théologie de l’Eglise et le sens de la Messe ont changé avec Vatican II, il est demandé si l’enseignement du Concile Vatican II est encore valable, selon lequel « [le sacerdoce commun des fidèles et le sacerdoce ministériel ou hiérarchique] ont entre eux une différence essentielle et non seulement de degré » (Lumen Gentium 10) et que les presbytres, du fait qu’il sont « investis par l’Ordre du pouvoir sacré d’offrir le Sacrifice et de remettre les péchés » (Presbyterorum Ordinis 2), agissent au nom et en la personne du Christ Médiateur, par qui le sacrifice spirituel des fidèles est rendu parfait. Il est en outre demandé si l’enseignement de la Lettre apostolique Ordinatio Sacerdotalis de saint Jean-Paul II, qui enseigne comme une vérité à tenir définitivement l’impossibilité de conférer l’ordination sacerdotale aux femmes, est toujours valide, de sorte que cet enseignement n’est plus soumis au changement ni à la libre discussion des pasteurs ou des théologiens.

 

5. Dubium à propos de l’affirmation « le pardon est un droit humain » et de l’insistance du Saint-Père quant au devoir d’absoudre tout le monde et toujours, de sorte que la contrition ne serait pas une condition nécessaire à l’absolution sacramentelle.

Il est demandé si l’enseignement du Concile de Trente, selon lequel la contrition du pénitent, qui consiste à détester le péché commis avec l’intention de ne plus pécher (Session XIV, Chapitre IV : DH 1676), est une condition nécessaire à la validité de la confession sacramentelle, est toujours en vigueur, de sorte que le prêtre doit différer l’absolution lorsqu’il est clair que cette condition n’est pas remplie.

 

Cité du Vatican, 10 juillet 2023

 

Walter Card. BRANDMÜLLER

Raymond Leo Card. BURKE

Juan Card. SANDOVAL ÍÑIGUEZ

Robert Card. SARAH

Joseph Card. ZEN ZE-KIUN, S.D.B.

 

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Deuxième formulation des “Dubia” adressés au pape François

 

A Sa Sainteté

FRANÇOIS

Souverain Pontife

 

Très Saint Père,

Nous vous sommes très reconnaissants des réponses que vous avez aimablement voulu nous adresser. Nous voudrions tout d’abord vous préciser que si nous vous avons posé ces questions, ce n’est pas par crainte du dialogue avec les hommes de notre temps, ni par peur des questions qu’ils pourraient nous poser au sujet de l’Evangile du Christ. Tout comme Votre Sainteté, nous sommes en effet convaincus de ce que l’Evangile apporte la plénitude à la vie humaine, et qu’il offre des réponses à chacune de nos interrogations. C’est une autre préoccupation qui nous anime : nous sommes inquiets de voir qu’il se trouve des pasteurs qui doutent de la capacité de l’Evangile à transformer le cœur des hommes et finissent par leur proposer non pas une saine doctrine, mais des « enseignements selon leurs propres désirs » (cf. 2 Tm 4, 3). Nous sommes également préoccupés par le fait qu’on ne comprenne pas que la miséricorde de Dieu ne consiste pas à couvrir nos péchés, mais qu’elle est bien plus grande, en ce qu’elle nous permet de répondre à son amour en gardant ses commandements, c’est-à-dire en nous convertissant et en croyant à l’Evangile (cf. Mc 1, 15).

Usant de même sincérité dont vous avez fait preuve à travers vos réponses, nous nous devons d’ajouter que celles-ci n’ont pas levé les doutes que nous avions exprimés, mais qu’elles les ont plutôt aggravés. Nous nous voyons donc dans l’obligation de soumettre à nouveau, en les reformulant, ces questions à Votre Sainteté, vous qui en tant que Successeur de Pierre êtes chargé par le Seigneur de confirmer vos frères dans la foi. Cela est d’autant plus urgent à la veille du prochain Synode, alors que beaucoup souhaitent utiliser celui-ci pour contredire la doctrine catholique, précisément sur les points sur lesquels portent nos dubia. Nous vous soumettons donc à nouveau nos questions, afin que vous puissiez y répondre simplement par « oui » ou par « non ».

 

1. Sa Sainteté insiste sur le fait que l’Eglise peut approfondir sa compréhension du dépôt de la foi. C’est en effet ce qu’enseigne Dei Verbum 8 et cela fait partie de la doctrine catholique. Votre réponse, cependant, ne saisit pas le sens de notre préoccupation. De nombreux chrétiens, y compris des pasteurs et des théologiens, soutiennent aujourd’hui que les changements culturels et anthropologiques de notre époque devraient pousser l’Eglise à enseigner le contraire de ce qu’elle a toujours enseigné. Cela concerne des questions qui ne sont pas secondaires, mais essentielles pour notre salut, telles la confession de foi, les conditions subjectives de l’accès aux sacrements, et l’observance de la loi morale. Nous voulons donc reformuler notre dubium : est-il possible que l’Eglise enseigne aujourd’hui des doctrines contraires à celles qu’elle enseignait auparavant en matière de foi et de morale, que ce soit par le Pape ex cathedra, ou selon les définitions d’un Concile œcuménique, ou encore selon le Magistère ordinaire universel des Evêques dispersés dans le monde (cf. Lumen Gentium 25) ?

 

2. Sa Sainteté a insisté sur le fait qu’il ne peut y avoir de confusion entre le mariage et d’autres types d’unions de nature sexuelle et que, par conséquent, tout rite ou bénédiction sacramentelle de couples de même sexe engendrant une telle confusion devrait être évité. Cependant notre préoccupation est d’un autre ordre : nous nous inquiétons du fait que la bénédiction des couples homosexuels puisse dans tous les cas susciter à confusion, pas seulement dans la mesure où elle pourrait les faire apparaître comme analogues au mariage, mais aussi en ce que les actes homosexuels seraient présentés en pratique comme un bien, ou tout au moins comme le bien possible que Dieu demande aux hommes dans leur cheminement vers Lui. Reformulons donc notre dubium : est-il possible que, dans certaines circonstances, un pasteur puisse bénir des unions entre personnes homosexuelles, laissant ainsi entendre que le comportement homosexuel en tant que tel ne serait pas contraire à la loi de Dieu et au cheminement de la personne vers Dieu ? En lien avec ce dubium, il est nécessaire d’en soulever un autre : l’enseignement constant du Magistère ordinaire universel, selon lequel tout acte sexuel en dehors du mariage, et en particulier les actes homosexuels, constituent un péché objectivement grave contre la loi de Dieu, indépendamment des circonstances dans lesquelles ils ont lieu et de l’intention avec laquelle ils sont accompli, est-il toujours valable ?

 

3. Vous avez insisté sur la dimension synodale de l’Eglise, en ce sens que tous, y compris les fidèles laïcs, sont appelés à participer et à faire entendre leur voix. Toutefois, notre difficulté est toute autre : le futur Synode sur la « synodalité » est aujourd’hui représenté comme si, en communion avec le Pape, il représentait l’Autorité Suprême de l’Eglise. Or, le Synode des évêques est un organe consultatif du Pape, il ne représente pas le Collège des évêques et il ne peut pas résoudre les questions qui y sont traitées ni émettre des décrets à leur sujet, à moins que, dans des cas bien déterminés, le Pontife romain, à qui il revient de ratifier les décisions du Synode, ne lui ait expressément conféré un pouvoir délibératif (cf. c. 343 C.I.C.). Il s’agit là d’un point décisif dans la mesure où ne pas impliquer le Collège des évêques dans des questions du genre de celles que le prochain Synode entend soulever et qui ont trait à la constitution même de l’Eglise, serait précisément en contradiction avec la racine de cette synodalité que le Synode prétend vouloir promouvoir. Permettez-nous donc de reformuler notre dubium : le Synode des évêques qui se tiendra à Rome, et qui ne comprendra qu’une sélection choisie de pasteurs et de fidèles, exercera-t-il, au sujet des questions doctrinales ou pastorales sur lesquelles il sera appelé à s’exprimer, l’autorité suprême de l’Eglise, qui appartient exclusivement au Pontife romain et, una cum capite suo, au Collège des Evêques (cf. can. 336 C.I.C.) ?

 

4. Dans sa réponse, Sa Sainteté a précisé que la décision de saint Jean-Paul II dans Ordinatio sacerdotalis doit être tenue pour définitive ; vous avez ajouté à juste titre qu’il est nécessaire de comprendre le sacerdoce, non pas en termes de pouvoir, mais en termes de service, afin de comprendre correctement la décision de notre Seigneur de réserver les Ordres sacrés aux seuls hommes. Néanmoins, dans le dernier point de votre réponse, vous ajoutez que la question peut encore être approfondie. Nous craignons que certains n’interprètent cette déclaration comme signifiant que la question n’a pas encore été définitivement tranchée. En fait, saint Jean-Paul II affirme dans Ordinatio sacerdotalis que cette doctrine a été enseignée infailliblement par le Magistère ordinaire et universel et qu’elle fait donc partie du dépôt de la foi. C’était la réponse de la Congrégation pour la Doctrine de la foi à un dubium soulevé à propos de la lettre apostolique, et cette réponse a été approuvée par Jean-Paul II lui-même. Il nous faut donc reformuler notre dubium : l’Eglise pourrait-elle à l’avenir avoir la faculté de conférer l’ordination sacerdotale à des femmes, contredisant ainsi le fait que la réservation exclusive de ce sacrement à des hommes baptisés appartient à la substance même du sacrement de l’ordre, que l’Eglise ne peut pas changer ?

 

5. Enfin, Sa Sainteté a confirmé l’enseignement du Concile de Trente selon lequel la validité de l’absolution sacramentelle requiert le repentir du pécheur, ce qui inclut l’intention de ne plus pécher. Et vous nous avez invités à ne pas douter de l’infinie miséricorde de Dieu. Nous voudrions réaffirmer que notre question ne résulte pas d’un doute sur la grandeur de la miséricorde de Dieu ; elle est née au contraire de la conscience de ce que cette miséricorde est assez grande pour nous rendre capables de nous convertir à Lui, de confesser notre faute et de vivre comme Il nous l’a enseigné. Cependant, certains pourraient interpréter votre réponse comme signifiant que le simple fait de s’approcher de la confession est une condition suffisante pour recevoir l’absolution, dans la mesure où cette démarche pourrait inclure implicitement la confession des péchés et le repentir. Nous voudrions donc reformuler notre dubium : un pénitent peut-il validement recevoir l’absolution sacramentelle si, tout en avouant un péché, il refuse de prendre d’une quelconque manière la résolution de ne pas le commettre à nouveau ?

 

Cité du Vatican, 21 août 2023

 

Walter Card. BRANDMÜLLER

Raymond Leo Card. BURKE

Juan Card. SANDOVAL ÍÑIGUEZ

Robert Card. SARAH

Joseph Card. ZEN ZE-KIUN

 

[Copie à Son Excellence Luis Francisco Card. LADARIA FERRER, S.J.]