Espagne : l’enquête internet en vue du synode sur les jeunes révèle la demande pour une Eglise moderne et tolérante

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Pas encore achevée – la faiblesse du nombre de participants a conduit à prolonger la consultation jusqu’à la fin décembre – l’enquête auprès des jeunes en vue du synode sur la foi et le discernement vocationnel fait déjà l’objet de dépouillements. La Conférence des évêques d’Espagne vient d’envoyer sa synthèse à Rome et comme attendu (ou espéré…) elle souligne la volonté des jeunes d’avoir une Eglise moderne, tolérante, et pas moralisatrice à l’excès.
 
Comme pour le synode sur la famille, mais cette fois sans passer par l’intermédiaire des diocèses, ce sondage à l’échelle internationale va être utilisé pour donner les grandes orientations du prochain synode des évêques à Rome. Mgr Kevin Farrell, responsable du Conseil pontifical pour les laïcs, a déjà signalé qu’il y voyait une force pour le changement.
 
Lequel ? Les réponses espagnoles en donnent une idée – même si elles sont le fruit d’un échantillon très peu représentatif, seuls 5.253 jeunes ayant participé…
 

En Espagne, les jeunes rêvent d’une Eglise moderne et tolérante

 
A 60 %, ils ont dit leur espoir de voir l’Eglise sortir de ses « structures », « ouvrir de nouveaux espaces » : ouverture, accueil « sans juger » font partie de leurs attentes. Même s’ils avouent que leurs propres « préjugés » les éloignent parfois de l’institution.
 
Le plus grand défi, selon ces sondés, est « d’atteindre les jeunes qui sont éloignés de l’Eglise », mais comment ? Les réponses sonnent comme des mots-clefs : écoute, engagement, accueil, formation de « référents » pour les jeunes, communautés « positives », faire agir les jeunes eux-mêmes dans le cadre de la pastorale juvénile.
 
Mais quelle pastorale ? Les sacrements et l’enseignement propre de l’Eglise ne font pas partie de leurs priorités (il faut dire qu’ils avaient prudemment été ignorés dans le questionnaire à choix multiples). Les « urgences », pour ces jeunes, sont la participation sociale, la promotion de la justice, l’écologie, la recherche de la paix et la solidarité avec les pauvres. Toutes préoccupations bien horizontales. A peine est-il question d’une recherche de « spiritualité » – « diffuse », commente Infocatolica.
 
Quant à ce qu’ils demandent, ces jeunes, à l’Eglise, cela offre un large champ de possibles aux futurs pères du synode : l’acceptation des différences, la tolérance, le dialogue (dans la clarté évangélique, toutefois… Que l’Eglise soit plus accueillante, plus inclusive, plus « samaritaine » ; qu’elle communique avec le langage d’aujourd’hui en renouvelant son message, qu’elle se « connecte » aux idées contemporaines sans être « excessivement moralisatrice », et qu’elle pratique une liturgie plus vivante et plus proche des fidèles.
 

L’enquête en vue du synode des jeunes va plaire à ceux qui veulent du « changement »

 
Bref, aux jeunes de déterminer la manière, et même de toucher un peu aux contenus, tandis que l’Eglise s’efforce de ressembler à ce qu’ils désirent. C’est pour le moins un « changement de paradigme », comme on dit ; l’Eglise, Mère et Maîtresse, sage et miséricordieuse précisément en raison de son expérience multiséculaire et surtout parce qu’elle transmet un message qui lui vient d’En-haut, est désormais soucieuse de se mettre au diapason du monde de la jeunesse.
 
Cet enseignement, sans être renié ni totalement oublié, est tout de même très peu mis en vedette. Il est vrai que la méthode du questionnaire par QCM limite et dirige les réponses : ainsi le sondé de 16 à 29 ans ne pouvait-il pas donner comme raison du fait qu’il n’avait pas d’enfant le fait qu’il n’était pas marié, ou engagé dans une vocation religieuse…
 
On comprend le souci de l’Eglise de parler aux jeunes et de leur faire connaître le Christ. Hélas, celui-ci est le grand absent du questionnaire et donc des réponses. En outre, face à une génération qui a non seulement été très majoritairement privé de formation religieuse, et qui sur le plan culturel a été largement déraciné, coupé des références communes de ses parents et aïeux, l’exercice d’aggiornamento se révèle encore plus périlleux.
 

Jeanne Smits