L’Espagne accordera la nationalité espagnole aux descendants des Juifs séfarades expulsés par les Rois catholiques

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Le Congrès espagnol a adopté jeudi une loi permettant aux descendants de Juifs expulsés d’Espagne par les Rois catholiques Isabel et Ferdinand en 1492 d’obtenir plus facilement la nationalité espagnole. Le texte était soutenu par tous les partis : belle entente politique pour un projet de loi qui avait pour but de réparer « une erreur historique » cinq siècles après les faits. Il n’y a pas qu’en France que l’on fait de l’autoflagellation.
 
Proposée par le gouvernement du conservateur Mariano Rajoy, la loi a été adoptée à l’unanimité et devrait entrer en vigueur en octobre. Les autorités espagnoles prévoient 90.000 candidatures de Juifs séfarades dans le monde. « Séfarades » signifie en effet « Espagne » en hébreu : le mot désigne ces Juifs chassés d’Espagne par les Rois catholiques, et qui ont répandu leur culture dans le bassin méditerranéen.
 

En donnant largement la nationalité espagnole aux Juifs séfarades, l’Espagne entend se libérer de son passé catholique

 
Si l’on peut envisager qu’une telle décision soit prise pour réparer ce que l’on considère comme une injustice, sa justification par les pouvoirs publics espagnols va bien plus loin. Il s’agit d’une attaque en règle contre tout ce qui fait l’histoire de l’Espagne, pétrie par son identité chrétienne ; elle vise tout particulièrement son passé catholique. C’est bien le passé qu’il s’agit de condamner : on veut aller vers un avenir radieux enfin libéré de ces mauvais souvenirs chrétiens.
 
Cela aboutit bien sûr à culpabiliser le peuple catholique d’Espagne et à affaiblir l’autorité de l’Eglise dans le pays. Comme le dit le ministre de la Justice Rafael Catala : « (la loi) dit beaucoup sur ce que nous avons été par le passé (…) et de ce que nous voulons être à l’avenir : une Espagne ouverte, diverse, tolérante. » Une Espagne qui ne soit surtout plus catholique.
 
L’Espagne accorde déjà la nationalité à ces descendants d’Espagnols, mais exige qu’ils renoncent à leur autre nationalité et résident en Espagne. Le nouveau texte prévoit que les candidats puissent devenir bi-nationaux : un processus jusqu’alors réservé aux Espagnols nés dans d’anciennes colonies du royaume, au Portugal ou en Andorre.
 

Tendre la main aux descendants des Juifs séfarades expulsés pour mieux rejeter les Rois catholiques

 
Les candidats devront disposer d’une attestation sur leurs origines émise par la fédération espagnole des communautés juives ou par un rabbin de leur lieu de résidence. Ils devront parler l’espagnol et prouver qu’ils ont un « lien spécial avec le pays ».
 
En 1992 le roi Juan Carlos était déjà revenu sur ce passé, en évoquant lors d’une visite à la synagogue de Madrid des « injustices » commises dans le passé.
 
Quitte à réparer les injustices, l’Espagne pourrait se pencher sur celle, bien plus récente, des persécutions contre l’Eglise catholique au temps du « Frente Popular » révolutionnaire. Le Front populaire marxiste qui a torturé et assassiné tant de prêtres et de religieuses alors qu’il était au pouvoir, et pendant la Guerre civile en Espagne…
 
Béatrice Romée