Ces jeunes qui ont voté pour le Parti travailliste de Jeremy Corbyn…

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Jeremy Corbyn, leader du parti travailliste en campagne à Leeds,
le 10 mai 2017.

 
Jeremy Corbyn a créé la surprise en faisant perdre à Theresa May sa majorité au Parlement, lors des élections britanniques du 8 juin. On peut aller chercher ici et là les raisons de cet imprévu sursaut de la gauche. Il semble qu’il ne faille pas négliger une nouvelle force montante que le Parti travailliste a particulièrement choyée depuis le début de sa campagne : les jeunes, et plus précisément cette tranche de 18 à 24 ans qui rechignait toujours, jusque-là, à se déplacer aux urnes…
 
Des « stars » ont mené la danse sur les réseaux sociaux, parmi lesquelles un célèbre rappeur de grime… symbole de ces minorités ethniques en pleine croissance que Corbyn a décidé de séduire, en plus des autres.
 

Plus de jeunes votants : une bonne nouvelle pour le Parti travailliste

 
Un article du Telegraph le confirme : le vote des jeunes, par tradition peu enclins à se manifester par les urnes, a été pour une fois significatif. Selon Sky News, 66,4 % des jeunes de 18 à 24 ans ont voté jeudi, contre 43 % aux élections générales de 2015.
 
Plus d’un million de ces 18-24 ans se sont inscrits sur les listes depuis que Theresa May a appelé à une élection le 18 avril. Et le fait est que cette tranche d’âge est particulièrement favorable à la gauche représentée par le « Labour Party » de Jeremy Corbyn. Selon l’institut de sondage Yougov. si les moins de 25 ans avaient été les seuls à voter, le Parti travailliste l’aurait emporté avec 71 % des voix… Les conservateurs, ce sont les vieux.
 
Le rôle des réseaux sociaux n’a pas été moindre : beaucoup de « stars » ont appelé à se déplacer pour faire gagner « le vrai politique »…. De la chanteuse Lily Allen au comédien Ricky Gervais…. « Nous avons besoin de changement, Nous avons besoin de Corbyn ». Mais le soutien le plus emblématique est bien celui de JME, alias Jamie Adenuga, rappeur de grime de son état.
 

Corbyn et le rappeur : une mise en scène soignée

 
Corbyn en a fait son « atout » jeunes. Son as de trèfle.
 
Ils ont soigné la mise en scène. La rencontre dans un café hipster de banlieue, autour d’une carafe d’eau, Corbyn en chemise rayée et JME en T shirt noir, casquette vissée sur la tête… La discussion improbable autour de la question des loyers, de l’égalité des chances, mais de la « musique »… JME lui explique pourquoi, jusque-là, il n’a jamais voté. Corbyn lui confie que les conservateurs ne font que protéger leurs propres intérêts et que pour lui, bien sûr, il n’en est rien…
 
Deux millions de personnes ont vu la vidéo, devenue virale.
 
Peu après, le rappeur JME prenait en charge le Snapchat de Corbyn : jusque-là, « nous croyions que le nom du vainqueur n’avait aucun intérêt pour nous (…) Nous voyons maintenant quelqu’un en qui nous avons confiance, quelqu’un d’humain ». Belle orchestration médiatique.
 

Le message des minorités

Qu’est-ce que le grime ? Inspiré des « rave party » et des « freestyles » de rap, ce genre musical est né sur fond de contestations sociales, de répression policière et de précarité dans les quartiers de l’East End londonien. Son message est éminemment politique : c’est celui des minorités immigrées.
 
Ces minorités qui grossissent outre-Manche pendant que diminuent les naissances des Britanniques d’origine… Il y a un an, déjà, le Royaume-Uni voyait un record des naissances d’enfants issus de femmes nées à l’étranger (27,5 % de toutes les naissances en Angleterre et au Pays de Galles selon le Bureau des statistiques nationales). Si la Pologne tient pour l’instant encore la première place, suivie du Pakistan et de l’Inde, le Pakistan la rafle quand il s’agit de l’origine des pères.
 
Un vivier potentiel de voix, donc, que Corbyn veut récupérer, en portant ses revendications. Le collectif grime de JME évoque l’abaissement du droit de vote à 16 ans, la baisse des coûts d’entrée à l’université, le revenu minimum, la construction de HLM… Le personnage d’activiste anti-apartheid qu’il fut les séduit. « Il est un des nôtres »… ! Son hostilité à l’héritage chrétien européen, son oui massif aux migrants, son rejet de la finance (une certaine), etc… vont dans leur sens.
 

Cette gauche radicale qui veut porter toutes les contestations

 
Drôle comme ils parlent tous d’ « un être humain sain et décent »… du « premier homme politique à représenter nos intérêts et nos besoins » ! La démagogie extraordinaire de cette gauche radicale qui va chercher « the many, not the few » (en reprenant un slogan de Corbyn), porte ses fruits.
 
Et pas seulement vis-à-vis des minorités ethniques. D’après un article du Guardian, dans lequel les journalistes ont interrogé plusieurs Britanniques âgés de 18 à 35 ans, Jeremy Corbyn est la principale raison du nouvel engagement de toute leur génération dans la politique, en particulier à cause du Brexit ou de la politique d’austérité qui sévit en Europe.
 
Les jeunes adhèrent à ces mouvements soi-disant anti-système, à l’instar de « Podemos » ou de « Syriza », séduits par cette gauche radicale qui les rassure et leur chante « Aie confiance… je suis là…. crois en moi… ». Tous les jeunes confondus, du gentil banlieusard au rappeur de grime – c’est un peu la nouveauté. A terme, cela peut changer la donne.
 

Clémentine Jallais