La méditation « pleine conscience » ou « mindfulness » rendrait ses adeptes plus égoïstes

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La « méditation pleine conscience » – on l’appelle mindfulness en anglais – a le vent en poupe. Pratiquée dans les écoles, recommandée aux parents pour obtenir des enfants calmes, vantée auprès des étudiants et des actifs, réponse moderne au stress et à la rapidité du rythme de la vie, on lui attribue toutes sortes de qualités. Depuis les applications embarquées d’office dans les Smartphones aux vidéos relaxantes qui tournent sur Internet, elle est omniprésente, figurant même au nombre des programmes de divertissement proposés sur les vols long-courriers – il devient de plus en plus difficile d’y échapper. Figure de proue ou cheval de Troie de la nouvelle spiritualité globale, la « pleine conscience » est présentée de manière presqu’unanimement positive par les médias. Mais voici qu’un expert en psychiatrie vient d’oser un avis défavorable : selon le Dr Alison Gray, du Collège royal des psychiatres au Royaume-Uni, la pratique solitaire de cette forme de méditation pourrait rendre ses adeptes plus égoïstes, voire les exposer à des problèmes psychologiques.
 

Le mindfulness conduit à l’introspection et à l’introversion

 
Cette psychiatre tient la chaire des questions relatives à la spiritualité au sein du collège : un organisme qui conseille les praticiens à propos de questions mentales liées à la spiritualité. Alison Gray avertit que les formes de spiritualité « tournées vers l’intérieur » peuvent finir par devenir « égo-centrées ».
 
Tiens donc ! Il faut croire que le nombrilisme bouddhiste n’est pas loin, et de fait, le mindfulness a des liens étroits avec cette spiritualité orientale, même si cela n’est pas toujours dit de manière explicite. On aurait tort d’y voir une simple manière de se recentrer dans le réel…
 
« Si la religion vise à relier les gens entre eux, la spiritualité peut conduire à l’introspection et à l’égoïsme », avertit le Dr Gray : « Cela n’arrive certes pas à chacun – chez beaucoup, elle va augmenter la passion pour le monde entier. Mais il existe la possibilité qu’elle retourne le regard vers l’intérieur pour centrer fondamentalement sur soi. »
 
Un processus qui n’est pas sans danger, du point de vue de la psychiatre : « Lorsqu’on regarde à l’intérieur de soi on peut trouver des aspects assez négatifs et même déstabilisants ; on a besoin alors d’une communauté pour aider à digérer tout cela et à rester sain », avertit-elle.
 

La méditation pleine conscience et ses relents égoïstes

 
Elle estime ainsi que ceux qui pratiquent la pleine conscience peuvent découvrir en eux-mêmes des « dynamismes et des ambitions égoïstes, des parties d’eux-mêmes qu’ils avaient auparavant tendance à projeter sur d’autres, de la colère, de la haine, toutes les émotions négatives. »
 
Cela ne manquera pas d’étonner, vu que les recommandations de la pleine conscience, dans la droite ligne de la spiritualité bouddhiste, visent justement à faire s’accepter comme on est, soi-même et autrui, et à vivre tout ce qui arrive sans émettre de jugement. Cette indifférence n’a rien à voir avec l’examen de conscience, on l’aura compris, et lui est même opposée.
 

Pleine conscience et spiritualité globale

 
Il semblerait donc que la conscience des défauts, largement interdite par notre mode de vie contemporain, véritable « conspiration contre la vie intérieure », puisse malgré tout résulter de la méditation pleine conscience, mais sans ouvrir à la seule sortie possible qu’offre une religion saine, la possibilité de demander pardon et d’être pardonné. D’où cette suggestion de recourir à la « communauté » (pour ne pas dire la thérapie de groupe) car tel n’est pas le but de la « pleine conscience » !
Reste ce que la critique du Dr Gray a de véritablement intéressant : en dénonçant l’obsession de soi qui peut accompagner le mindfulness, elle met sans le vouloir le doigt sur le véritable problème de cette spiritualité où elle voit un mélange d’anciennes traditions religieuses. C’est une spiritualité sans transcendance ; à l’inverse de la religion qui, contrairement à ce que croit ce psychiatre, n’est pas faite pour relier les hommes entre eux mais pour les mettre en relation avec Dieu, la « pleine conscience » se limite aux horizons humains individuels et au bout du compte, à soi-même. En ce sens, c’est une anti-religion et à ce titre, il est logique qu’elle conduise au renfermement sur soi.
 

Jeanne Smits