Shamsail Saraliyev, membre de la Douma, a proposé que les expressions « terroriste islamiste » et « militant islamiste » soient proscrits des médias, pour éviter de donner de fausses impressions à propos de l’islam et d’exposer les croyants ordinaires au risque d’amalgame. L’élu, membre du parti au pouvoir « Russie unie », est originaire de Tchétchénie, où l’islam domine, et fait partie de la commission de la Douma sur les affaires étrangères. En réclamant une véritable censure, il ne fait que codifier et élargir ce que nombre de médias mondiaux appliquent déjà dans une certaine mesure : une autocensure destinée à ne pas « discriminer » les musulmans.
 

Expressions à proscrire !

 
Mais il reste fréquent de trouver les expressions « terroristes islamiques », « islamistes », « djihadistes », « Etat islamique terroriste », en Russie ou ailleurs. « Ces expressions poussent les gens à conclure que la religion musulmane et le terrorisme sont une seule et même chose. Les gens ordinaires commencent automatiquement à associer les musulmans avec les bandits, les assassins et les terroristes. »
 

Le terroriste : un « dissident » ?

 
Et d’assurer que la majorité des musulmans qualifient les groupes radicaux de « Kharijites », ou « dissidents », « insurgés ». Il en va ainsi des djihadistes de Syrie ou d’Irak : « Ils se désignent comme l’Etat islamique, mais ils n’ont absolument rien à voir avec l’islam ! Pour eux, l’islam n’est qu’un manteau dont ils couvrent leurs mauvaises actions ! »
 
Rien à voir avec l’islam ? Voire. Les persécutions de chrétiens qui prennent désormais des proportions dramatiques dans le monde se produisent dans leur immense majorité dans les Etats qui se revendiquent islamiques. Les luttes entre diverses factions de l’islam – entre chiites et sunnites – ne sont pas non plus des chimères. La peine de mort qui punit l’apostat ou le « blasphémateur » en Arabie Saoudite ou au Pakistan ne désigne pas précisément une religion de tolérance et de paix…
 

Pas d’islam dans l’islamiste !

 
Mais pour Saraliyev l’islam est une religion de bienveillance qui promeut la coexistence pacifique parmi les peuples : dire qu’elle fomente l’agression et l’extrémisme est soit une erreur, soit un « mensonge sans fondement » : « De même que nous ne qualifions pas les fascistes de “chrétiens”, nous devons cesser d’utiliser le terme “musulmans” pour décrire des groupes militants radicaux qui se disent adeptes de l’islam », a-t-il déclaré devant la Douma, à la satisfaction d’autres élus, selon Izvestia.
 
Le même élu faisait partie des députés soutenant une loi qui entendait proscrire la mention de l’origine ethnique des criminels ou des suspects dans les médias : si la loi n’a pas encore été adoptée, plusieurs médias ont adopté cette règle volontairement, selon Russia Today, qui voit dans cette autocensure un exemple de la manière dont l’interdiction d’établir un lien entre islam et terrorisme pourrait fonctionner à l’avenir.
 

La Russie politiquement correcte

 
La règle de la discrétion à propos des origines ethniques « non-caucasiennes » est de mise en France aussi, depuis longtemps.
 
Censure, autocensure… Dans la Russie ex-soviétique, ce ne serait pas une nouveauté, mais elle correspond désormais au « politiquement correct » global. Au nom du relativisme et de l’égale valeur de toutes les religions, cela fait désordre en effet d’autoriser une critique historique et actuelle de toute religion, même islamiste – pourvu qu’elle ne soit pas catholique.