C’est un parti en perte de vitesse dans les sondages qui réunissait ce week-end environ 600 délégués à Cologne pour un congrès chargé de décider des futures orientations du parti et de nommer ses chefs de file pour les élections législatives fédérales prévues en Allemagne pour le 24 septembre. Alors qu’elle était passée entre 2015 et 2016 de 4 % environ dans les sondages à 14-15 % à la faveur de la crise migratoire aggravée par les décisions désastreuses d’Angela Merkel, et alors qu’elle a obtenu des scores à deux chiffres dans plusieurs élections régionales l’année dernière, l’AfD oscille désormais entre 7 et 11 % dans les sondages et n’a obtenu que 6 % des voix en mars pour les élections au parlement de Sarre. Ce parti qui avait une ligne plutôt libérale-conservatrice et qui est qualifié de « populiste » de droite du fait de son opposition à l’immigration de masse, de son programme souverainiste et de sa volonté d’abandonner l’euro est malgré tout représenté, quatre ans seulement après sa création, dans 11 parlements régionaux sur 16 et il se prépare à faire son entrée au Bundestag en septembre. Mais sa figure de proue, Frauke Petry, renonce à se présenter aux législatives prochaines.
L’Alternative pour l’Allemagne confrontée aux provocations verbales de certains de ses dirigeants
Le recul de l’AfD est sans doute en partie dû au durcissement de la politique migratoire menée par le gouvernement de la grande coalition de la CDU-CSU d’Angela Merkel avec le SPD social-démocrate. Pour certains analystes, les revirements et déboires de Donald Trump aux Etats-Unis pourraient aussi avoir fait fuir certains électeurs un moment tentés par le vote « populiste ». Frauke Petry, qui avait remplacé le cofondateur du parti Bernd Lucke en juillet 2015 en tant que représentante de l’aile droite, anti-immigrationniste, de l’Alternative pour l’Allemagne, aurait voulu, pour inverser la tendance et ratisser plus large aux élections, faire taire les voix les plus politiquement incorrectes au sein de son parti. Des voix comme celles de Björn Höcke, le chef de l’AfD dans l’État de Thuringe, en ex-RDA, tonnant en janvier dernier contre le Mémorial de l’Holocauste à Berlin, « monument de la honte », et contre la culpabilisation permanente de la nation allemande à cause des crimes commis sous le nazisme. En février, les deux tiers des membres du bureau exécutif de l’AfD ont soutenu la demande de Petry d’exclure Höcke, mais la décision définitive sera prise par un comité d’arbitrage au sein du parti. Seule victoire de Frauke Petry ce week-end à Cologne : sa demande n’a pas été discutée.
Frauke Petry mise en échec au congrès de l’AfD, avait déjà renoncée à êre candidate aux législatives
Frauke Petry avait déjà annoncé mercredi dans une vidéo publiée sur son profil Facebook qu’elle renonçait à diriger la campagne pour les élections au Bundestag et même à se présenter. Dans cette vidéo, Petry évoquait les dissensions internes de l’AfD et les provocations verbales de certains représentants du parti, mais aussi le congrès qui devait se tenir ce week-end à Cologne pour définir la future stratégie. Cependant, les délégués réunis dans un hôtel protégé par quelque 4000 policiers en raison de la présence de nombreux manifestants anti-AfD, dont un millier environ de militants « antifa » violents, ont rejeté les motions de leur leader en faveur d’une ligne « modérée » susceptible de permettre à l’AfD de gouverner un jour, y compris en coalition avec la CDU-CSU, même si le parti d’Angela Merkel rejette en bloc une telle possibilité.
Ayant refusé l’adoption d’un discours politiquement correct dans le but d’élargir la base électorale du parti, le congrès de Cologne s’est aussi choisi ses chefs de file pour les élections fédérales de septembre : le national-conservateur Alexander Gauland, un transfuge de la CDU, et la libertarienne Alice Weidel, une économiste et consultante de 38 ans qui élève un enfant en couple lesbien. Un duo contrasté, donc, pour ratisser encore plus large. Conduite par ces deux leaders, l’Alternative pour l’Allemagne compte axer son programme sur l’arrêt de l’immigration de masse incontrôlée, l’abandon de l’euro et des politiques en faveur de la natalité.
L’AfD veut ratisser plus large en Allemagne
La présence d’une mouvance chrétienne au sein de l’AfD a été critiquée ce week-end par l’organisation de la jeunesse catholique Bund Neudeutschland (ND), au prétexte que l’opposition de l’Alternative pour l’Allemagne à l’immigration de masse en ferait un parti « nationaliste et hostile aux étrangers », selon le directeur du ND qui est aussi député de la CDU. De son côté, le cardinal Rainer Maria Woelki, archevêque de Cologne, a affirmé samedi que les personnes manifestant contre l’AfD dans les rues de la ville étaient là pour défendre « l’ouverture au monde, la tolérance et la solidarité ». Des remarques qualifiées de « dénigrantes » et « moches » par Frauke Petry, mais qui ne sauraient surprendre quand on sait que l’Église catholique allemande, qui perd des fidèles d’année en année, est l’une des plus politiquement correctes d’Europe.