Le parti du Labour dans la tourmente au Royaume-Uni : l’antisémitisme est à gauche, chez les travaillistes de Corbyn

antisémitisme gauche travaillistes Corbyn Labour Royaume Uni
 
Jeremy Corbyn, le très marxiste leader des travaillistes britanniques, est sous le feu des critiques de la… droite depuis des mois pour ses liens avec des groupes négationnistes et d’autres (ou parfois les mêmes, de gauche) qui soutiennent des théories du complot accusant « les juifs » de manipuler l’actualité et d’être notamment responsables des attaques du 11 septembre. Son soutien à un lobby pro-palestinien a renforcé la dénonciation de l’actuel chef du Labour, accusé d’antisémitisme ou à tout le moins d’absence d’action face aux antisémites qui seraient nombreux dans son parti. Et la presse du Royaume-Uni accorde une large place aux informations selon lesquelles Jeremy Corbyn refuse depuis 2016 de donner suite à une demande de réunion avec le groupe interparlementaire de lutte contre l’antisémitisme, pourtant présidé par un membre du Labour.
 
Le dernier scandale en date concerne un candidat travailliste local accusé de négationnisme : Roy Smart, qui briguait une place d’élu à Tunbridge Wells, a perdu sa nomination officielle pour avoir notamment partagé des liens vers un site appelé Holocaust Deprogramming Course : « Cours de déprogrammation de l’Holocauste ». Il a été renvoyé à la demande du groupe Momentum – l’aile gauche du parti travailliste proche de Corbyn – paniqué aujourd’hui face aux accusations dont il reconnaît de plus en plus le sérieux.
 

L’antisémitisme est à gauche au Royaume-Uni

 
Smart a largement partagé l’idée que « la vérité n’a pas besoin de lois pour la protéger », réclamant la possibilité démocratique de discuter à propos de l’existence de la Shoah mais se défendant d’être négationniste. Voilà donc la gauche britannique contrainte d’affirmer, par le truchement de Momentum, que « Les accusations d’antisémitisme ne doivent pas et ne peuvent pas être écartées comme de simples opérations de dénigrement de la part de droite ou comme résultant de divers complots ».
 
Et voilà Momentum qui affirme que « Les exemples actuels d’antisémitisme au sein du Labour ne sont pas seulement liés aux problèmes de quelques rares et outranciers mauvais sujets, mais à des préjugés inconscients qui se manifestent de manières diverses, nuancées et subtiles et qui sont plus répandus au sein du parti travailliste que la plupart d’entre nous imaginions il y a seulement quelques mois ».
 
Dans le même temps, l’un des ministres du cabinet fantôme travailliste, Stephen Pound, a affirmé qu’il y avait un « vrai problème » auquel son parti allait devoir s’atteler. Mais il a insisté pour dire que les allégations actuelles, utilisées selon lui pour fragiliser Corbyn à la tête du parti, doivent être traitées à l’intérieur du mouvement, ajoutant que le Labour doit résister face à tout appel visant à renvoyer des membres sans enquête selon les règles de procédure interne.
 

Le travailliste Corbyn contesté à la tête du Labour Party : l’antisémitisme y est plus répandu qu’on ne le pensait

 
Aujourd’hui, les travaillistes britanniques se mettent en quatre pour prouver que le Labour est un parti « inclusif » ouvert à « chaque personne » au Royaume-Uni, tandis que Jeremy Corbyn a adressé un message à ses compatriotes juifs pour fêter la Pâque. Pendant ce temps, les comptes de réseaux sociaux de soutien au chef de l’opposition multiplient les messages extrêmement violents à l’égard d’élues ou de journalistes juives en tant que telles – mais aussi d’autres personnalités conservatrices.
 
Le Labour tente de se désolidariser de ces comptes avec lesquels il explique n’avoir aucun lien organique, même si Corbyn en a fait partie. Mais les tabloïdes de droite soulignent que le parti ne s’est toujours pas donné la peine d’expulser Ken Livingstone, ancien maire de Londres, alors que cela fait déjà deux ans qu’il a affirmé que Hitler était un « sioniste »… Tandis que Corbyn parle de « nos amis du Hamas et du Hezbollah ».
 
Le mouvement travailliste juif organise désormais des ateliers au sein du Labour pour expliquer aux membres « comment ne pas être antisémite ».
 

Anne Dolhein