La dénatalité est la vraie menace pour l’Occident – et pour l’Occident chrétien

dénatalité menace Occident chrétien
 

On voit le monde s’arc-bouter sur des questions plurielles d’organisation et de direction de la société… mais qui pour se rendre compte que ladite société qu’on voudrait faire vivre le mieux possible, est en réalité en train de mourir ? Et on ne parle même pas encore de civilisation ou de culture : elle meurt à petit feu, faute de combattants. La fécondité mondiale a connu une baisse spectaculaire tout au long de ce siècle. Dans les pays développés, elle vit même un effondrement sans précédent et chaque nouvelle année bat un nouveau record. L’horizon assuré par les chiffres de la dénatalité est celui d’une instabilité fatale avant une fin programmée.

Que restera-t-il de l’Occident ? Il faut se poser la question, comme se la pose David Thunder sur le média en ligne Mercator. Mais pourquoi, surtout, cette peur d’avoir des enfants ?! Il faut aussi se la poser. Nous sommes passés d’une époque ou ne pas avoir d’enfants était, sinon une honte, du moins un regret profond, ancré, à une époque où on est poussé à célébrer cet état de fait ou en tout cas, à ne pas y voir d’inconvénient, que ce soit pour des raisons matérielles ou idéologiques.

La population occidentale va imploser. C’est une menace réelle. Le monde chrétien devra-t-il céder la place ?

 

Un tiers ou plus de la population deviendra « sans enfant à vie »

C’est simple, comme le notait, en mars, l’Institute for Health Metrics and Evaluation (IHME) de l’université de Washington, aux Etats-Unis, trois quarts des pays n’auront pas un taux de fécondité suffisamment élevé pour maintenir la taille de leur population d’ici à 2050. Si l’on observe la carte 2021 « Notre monde en données » (basée sur les données publiées par la division Population du Département des affaires économiques et sociales des Nations unies), en dehors de l’Afrique, il n’existe qu’une poignée relativement petite de pays qui continuent à avoir des taux de natalité supérieurs au niveau de remplacement – et aucun de ces pays ne se trouve en Europe ou en Amérique du Nord ; la Russie, la Chine, le Japon ou l’Inde n’en font pas non plus partie.

 

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L’année 2023 a encore battu tous les records. La Corée du Sud, avec le taux de fécondité le plus bas au monde (0,78), a battu son propre chiffre avec 0,72. Au Japon, les naissances ont chuté de 5,1 %. En France, le taux de fécondité est passé à 1,68 (et les médias s’en affolent, nous disait Jeanne Smits) : un chiffre qui se rapproche de celui des Etats-Unis passés cette même année à un niveau record de 1,62. Au Canada, la situation est encore pire : le taux de 1,33 observé en 2022 (dernier chiffre disponible) est le plus bas jamais enregistré sur plus d’un siècle de données.

Non seulement les couples ont moins d’enfants (et la situation empirera puisque les plus fortes baisses parmi les groupes d’âge se situent chez les 20-24 ans). Mais aussi et surtout, il y a ce retardement avéré, de plus en plus problématique, de la procréation : parce que les femmes se mettent en couple ou se marient plus tard. Selon le Pew Research Center, 41 % des femmes âgées de 25 à 44 ans en 2018, aux Etats-Unis, étaient célibataires et sans enfants, et cette proportion devrait atteindre 45 % d’ici 2030. Un rapport récemment publié par un important groupe de réflexion canadien, l’Institut Macdonald-Laurier, notait que le fait d’être célibataire pour les moins de 30 ans était devenu la norme…

 

Dénatalité : ne pas avoir d’enfant n’est souvent pas un choix

Et même lorsqu’ils se marient, les enfants ne sont pas forcément le premier objectif. En 2022, 43 % des ménages américains n’avaient pas d’enfants, soit une augmentation de 7 % par rapport à la décennie précédente. Et quelque 44 % de ces couples âgés de 18 à 49 ans interrogés par le Pew Research Center ont déclaré qu’il était « peu probable » qu’ils aient des enfants, contre 37 % en 2018. Parmi eux se trouvent ceux que l’on appelle les « DINK’s », « Double Income No Kids » (deux adultes avec un revenu stable et pas d’enfants). Même en Chine, ils ont fait leur apparition, ce qui aurait semblé improbable il y a seulement dix ans : une étude récente de l’Institut des sciences et technologies de Luoyang estime que les DINK représentaient environ 38 % des ménages chinois en 2020 – contre 28 % dix ans plus tôt.

Pour le Pew Research Center, les raisons de ce retard à enfanter vont de la liberté financière (33 %), à la préservation de la flexibilité quotidienne, en passant par l’incapacité de subvenir économiquement à un enfant pour le moment (26 %). Ce retardement de la procréation est donc subi plus qu’il n’est voulu : c’est surtout un signe de ces temps post-modernes. En décembre 2022, l’Institute for Family Studies avait aussi confirmé que la majorité des femmes sans enfants désirent en réalité avoir des enfants.

Pour Stephen J. Shaw,, auteur du film passionnant Birth Gap et démographe, il s’agit du drame de l’infécondité involontaire. Selon lui, rappelait Jeanne Smits dans un grand article de fond sur la dénatalité, seuls 5 % de la population ne veulent pas du tout avoir d’enfants pour diverses raisons. La vie free-child, un nouveau concept ? Certes, les vidéos sur les réseaux sociaux se multiplient sur les journées de ces couples, remplies de loisirs à gogo… mais elles ont le triste goût de l’auto-justification.

 

D’autres ont pris le contrôle du ventre des femmes

Oui, il est difficile de lutter : les chiffres, toujours plus bas, sont là pour le prouver. Le monde, et en particulier notre jeunesse, est noyé dans la peur de l’effort et la crainte du lendemain, l’oubli de la générosité et la négation de la transmission, l’épanouissement personnel et l’exigence du conjoint idéal, sans compter la consommation en augmentation permanente de la pornographie ou encore, plus fondamentalement, la perte du sens fondamental de la vie.

Comme le rappelait un autre article de Mercator, l’antinatalisme de Paul Ehrlich est toujours là, le monde a juste changé l’argument et, même, ne cesse de le changer : « Il y a toujours une raison pour ne pas avoir d’enfants. »

Et puis la culture de mort a donné les moyens adéquats à ce changement des mentalités, à travers la contraception et l’avortement. On a clamé qu’on offrait la liberté aux femmes, alors qu’on les bridait (et qu’on débridait par là même les hommes).

Et les gouvernements occidentaux renforcent toujours plus leur politique antinataliste : en février a été introduite au Canada une nouvelle législation fédérale qui permettra « l’accès universel gratuit aux contraceptifs », y compris à la « pilule du lendemain ». Ce n’est pas « le choix » qu’on offre aux femmes, comme le disait le Premier ministre très progressiste Justin Trudeau ; c’est un esclavage toujours plus grand.

 

La menace pèse sur l’Occident chrétien

Que signifie tout cela à terme ? « A court et moyen terme, cela crée nécessairement des pénuries de main-d’œuvre, qui nuisent à l’efficacité économique et à la prospérité. Cela rend également le modèle occidental traditionnel d’Etat-providence inapplicable, puisque l’Etat-providence occidental exige que les cotisations des travailleurs dépassent les coûts des prestations sociales, qui deviennent paralysantes dans une population vieillissante avec des factures de soins de santé qui montent en flèche », écrit David Thunder dans Mercator.

« D’un point de vue purement démographique, on pourrait reconstituer les populations mourantes avec des jeunes venus d’Afrique, d’Afghanistan, du Venezuela ou du Kazakhstan, puisque ces sociétés ont des taux de fécondité durables. Mais l’idée selon laquelle toute pénurie de main-d’œuvre, y compris de main-d’œuvre hautement spécialisée, sera comblée par les immigrants sans une période de transition douloureuse et coûteuse, semble naïve », ajoute-t-il. Mais oubliant, au passage, que les robots sont en train d’être peaufinés qui opéreront le vrai, le plus radical « grand remplacement » dans un monde d’où l’homme disparaît…

Et puis surtout… l’extinction culturelle sera l’horizon assuré. « Je ne suis pas sûr qu’une culture différente attende dans les coulisses pour nous aider à renouveler notre prospérité économique et à préserver des valeurs telles que la liberté personnelle, l’Etat de droit, la tolérance et l’ouverture qui définissent les sociétés occidentales depuis des générations », continue Thunder.

Je ne suis pas sûre que les cultures de remplacement qui attendent en coulisses pérennisent les fruits de nos deux mille ans de christianisme. Que naissent les enfants !

 

Clémentine Jallais