Valls propose des cellules de « community managers » et de hackers contre le discours djihadiste sur internet, alors qu’il n’a toujours pas ordonné le déréférencement des sites-phares de la propagande…

Discours djihadiste community manager internet
 
C’est dans le cadre d’une « masterclass » (cours donné par une personnalité ou un spécialiste) intitulée « De nouveaux médias, pour de nouvelles formes d’engagements? », organisée à l’université de Paris-Dauphine, que Manuel Valls a évoqué mercredi le second volet de sa politique destinée à contrer le discours djihadiste sur internet et en particulier sur les réseaux sociaux. Il s’agit de la création de deux cellules de « community managers », c’est-à-dire d’animateurs de communautés web (au passage, merci M.Valls pour cet anglais intrusif).
 
Il faut dire que la première phase de contre-attaque après les attentats de Paris en janvier dernier, n’avait pas connu la meilleure fortune. Le site Internet « stop jihadisme » lancé par le gouvernement en février, avec ses spots d’information et ses forums, avait été rapidement détourné par les djihadistes sur les réseaux sociaux et n’avait pas rencontré de vrai public.
 

« Un bataillon de community managers » pour « croiser le fer » (Valls)

 
« Nous devons franchir une nouvelle étape » a déclaré Valls, péremptoire. « Nous allons donc mettre en place un bataillon de ‘community managers’ de l’État pour opposer, et c’est plus difficile, une parole officielle à la parole des djihadistes et ne pas leur laisser l’espace numérique ». Pour viser le « cœur de cible, les jeunes en voie de radicalisation eux-mêmes ».
 
Et « on va recruter non pas que des policiers, mais aussi des ‘hackers’ ». Sûr que dans les bataillons du Croissant, l’on tremble déjà…
 
« Nous produirons des outils de contre-discours pour alimenter ces ‘community managers’ que j’évoquais, et qui pourront ainsi croiser le fer plus efficacement avec les recruteurs djihadistes sur la toile pour ouvrir les yeux à ceux qui sont embarqués dans cette logique de radicalisation violente » Et sus à « la théorie du complot » ! Parce que la « propagande moderne » et « très efficace » de ces discours d’endoctrinement sera néanmoins aisément combattue par la « parole officielle » de la République…
 

Une « guerre de communication » ?

 
Un peu emporté dans son élan patriotique ou plutôt républicain, Valls a commis quelques imprécisions que s’est empressé d’éclaircir Matignon. Le travail sera effectivement réparti entre deux cellules : l’une, rattachée à l’État et l’autre relevant d’une fondation privée, qui fera de la recherche sur l’évolution du discours et de la propagande « afin de produire du contenu permettant de décrypter tous les leviers d’embrigadement des organisations djihadistes ».
 
« Ensuite, ce contenu sera diffusé par des militants associatifs qui iront chercher les internautes, pour tenter de retourner la situation. »
 
C’est là qu’interviennent les fameux « hackers » de Manuel Valls, tout heureux d’utiliser les mêmes armes que l’adversaire. « Il y a le levier du contenu. Et celui du contenant : déstabiliser les canaux qui permettent de diffuser les contenus, dans le pur esprit d’une contre-attaque », explique le directeur du Service d’information du gouvernement. Des « hackers » à chapeau blanc…
 
Les structures devraient être prêtes d’ici la fin de cette année.
 

L’État n’a encore jamais réclamé le déréférencement de sites pro-djihad

 
Les filiales françaises de Google, Facebook et Twitter ont aussi annoncé, ces derniers jours, leur alliance afin de contrer les multiples vidéos de propagande pour le djihad, diffusées via leurs réseaux. « Nous avons retiré de YouTube 14 millions de vidéos l’an dernier », a ainsi fait valoir le directeur des politiques publiques de Google France. « Mais ce n’est pas suffisant: pour les combattre, il faut diffuser un contenu positif », a-t-il ajouté.
 
Là est bien le problème. On a comme un doute sur l’efficacité du « contre-discours », de la « parole officielle » de la République de Manuel Valls.
 
Et puis, de toute façon, on continue à laisser se développer les lieux réels de radicalisation des jeunes, à savoir les mosquées et autres « centres culturels ». On ne reconduit pas à la frontière les imams au verbe clair, pourtant interdits de séjour. L’État n’a même pas commencé à utiliser la loi anti-terroriste pour réclamer le déréférencement de sites pro-djihad… Google France affirme ne « jamais avoir reçu aucune demande de la part des autorités » !
 
Alors, ces nouvelles idées : du vent – elles ne feront juste que renforcer le système de surveillance globale qui se met en place et pas forcément dirigé contre les djihadistes en puissance.
 

Clémentine Jallais