Nous ne saurons jamais exactement ce que se sont dit le pape François et John Kerry, envoyé spécial de Joe Biden pour le climat, lors de leur entrevue privée lundi au Vatican, car il n’est pas dans les usages du Saint-Siège de diffuser le détail des conversations. Mais nous en savons assez, par le biais de l’entretien accordé par la suite par l’ancien Secrétaire d’Etat américain, pour en avoir une bonne idée. Interrogé par un petit groupe de journalistes au pied de la salle de presse du Vatican, juste après la rencontre, il a notamment déclaré : « Je pense qu’il est important que les chefs religieux s’engagent sur ce problème parce qu’il touche au cœur de la morale, de la responsabilité individuelle envers les autres et envers la Terre mère. »
Le cœur de la morale, rien moins ! Et nous qui pensions que « le cœur de la morale » relevait de nos rapports avec Dieu : de notre obéissance au Décalogue et aux lois qu’Il nous donne pour faire sa volonté, dans nos rapports avec lui et avec les autres. Voilà que la « Terre mère » s’invite dans le tableau, la Sainte Trinité ayant été éliminée du dispositif, et qu’elle s’y invite pour se placer au centre, avec ce titre qui est celui réservé à notre planète par les religions païennes.
La morale du climat s’incline devant la Terre-mère
Car s’il est vrai que la terre nous nourrit, de par la volonté divine, elle est une créature, et une créature qui est inférieure à l’homme ; elle n’est pas la « mère », elle n’est pas sa « mère ». L’homme, créé corps et esprit, fait à l’image de Dieu et à sa ressemblance, capax Dei (capable de Dieu comme le disait saint Augustin), a été placé par Lui au sommet de la création. Et s’il a la responsabilité des biens qui lui sont confiés, il ne leur est pas soumis ; encore moins a-t-il le devoir de sacrifier son bien au bien de la terre. Ce qu’il sacrifie en effet, il doit le sacrifier à Dieu seul : tout le reste est idolâtrie.
Il n’est pas possible de tirer des propos de John Kerry l’affirmation selon laquelle le pape a approuvé ce bouleversement radical de la morale.
Mais John Kerry livre là, au sortir de sa visite chez François – toute première visite d’un responsable politique de haut rang au pape à sa sortie d’opération pour occlusion intestinale qui l’a immobilisé pendant une dizaine de jour – un regard précis sur la nature de la « lutte contre le réchauffement climatique ». C’est une religion, une religion païenne avec un faux dieu sur lequel est « centré » la morale que toute l’humanité est invitée à obéir, sous peine de mourir. Que ne nous a-t-on pas dit, en effet, du risque de voir « disparaître » l’humanité, punie en quelque sorte pour la « destruction » en cours de la planète…
John Kerry, François, Gorbatchev, même combat
La conceptualisation de ce nouveau culte se trouve notamment chez Mikhaïl Gorbatchev, l’homme chargé de la mise en œuvre de la perestroïka, cette grande bascule de l’URSS vers une « libéralisation » permettant à l’ex-Union soviétique de profiter de l’économie de marché tout en conservant sa police politique et sa continuité historique avec le communisme, pour partie assumée. Sous le titre The Search for a New Beginning (1995), l’ancien président russe plaidait ainsi pour un Nouvel Ordre Mondial avec la « Maison commune » en son cœur, tous les Etats devant se soumettre à cette exigence d’une sorte de nouvelle Genèse (New Beginning), avec de nouveaux commandements pour l’humanité. La religion écologique et globale était lancée. Aujourd’hui on perçoit encore mieux son inspiration socialiste, ses objectifs égalitaristes et sa haine fondamentale de l’homme.
John Kerry se trouvait à Rome dans le cadre du voyage européen qui le conduira à Paris pour participer au Sommet pour un nouveau pacte financier mondial organisé à l’initiative d’Emmanuel Macron les 22 et 23 juin en présence de tout le gratin mondialiste, de Macron lui-même à Antonio Guterres, Li Qiang (Premier ministre de la Chine), Janet Yellen, Ajay Banga (nouveau président de la Banque mondiale) et Melinda Gates, et encore (entre autres) de Mohammed Bin Salman Bin Abdulaziz Al-Saoud, Jeffrey Sachs, Ursula von der Leyen, la Bulgare Kristalina Georgieva, Rajiv Shah (président de la Fondation Rockefeller) et le président de Cuba, Miguel Diaz-Canel Bermudez, qui vient lui aussi de rendre visite au pape François, premier chef d’Etat reçu après l’opération du souverain pontife.
La morale du climat au service du collectivisme
Tout cela relève en réalité d’une même logique, où le Nord « paie » pour « l’exploitation » du Sud, « victime » de la colonisation et du « changement climatique ».
Le pape participe pleinement à ces initiatives mondialistes par nature, puisqu’il s’agit d’imposer cette logique de manière supranationale. John Kerry, catholique pratiquant (selon les journaux, malgré son palmarès radicalement pro-avortement et pro « LGBT ») a en tout cas été enchanté par leurs échanges.
Il a déclaré aux journalistes que le pape François exerce une « influence remarquable » sur la question du changement climatique, « parce qu’il a toujours été un défenseur franc et engagé de cette question, et qu’il y croit profondément ». « Il est très inquiet de savoir où nous en sommes, où nous n’en sommes pas et où nous devrions être », a ajouté John Kerry. « Je pense qu’il réfléchit aux moyens de continuer à avoir un impact sur cette question, j’en suis sûr. »
Il aurait pu ajouter qu’il a offert au pape le livre Silent Spring publié en 1962 par Rachel Carson pour dénoncer les méfaits de la pollution des pesticides, mais aussi pour prêcher la profonde interconnexion entre l’homme et la nature, de telle sorte qu’elle est considérée comme la vraie fondatrice de la Deep Ecology qui prône une révolution radicale dans les rapports de l’homme avec la planète et notamment la décroissance substantielle de la population humaine, et qui se veut mouvement spirituel : « La complète réalisation de Soi d’un individu quelconque dépend de celle des autres. Réalisation de Soi pour tous les êtres vivants ! »
Il n’a d’ailleurs pas exclu que le pape se rende à la COP 28, qui pour Kerry aura le même niveau d’importance que la COP 21 de Paris. Pour prêcher la nouvelle morale ?