Mgr Nicola Bux appelle le pape François à faire une déclaration de foi

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Monseigneur Nicola Bux

 
Dans le contexte de la demande des quatre cardinaux au pape François de répondre à leurs « Dubia » à propos de l’exhortation post-synodaleAmoris laetitia, restée désespérément sans réponse, une nouvelle interpellation vient d’être adressée au Saint-Père, cette fois par Mgr Nicola Bux, théologien et ancien conseiller de la Congrégation pour la Doctrine de la foi sous Benoît XVI. Il a choisi de lancer son appel publiquement, en répondant à un entretien avec Edward Pentin duNational Catholic Register : le pape, a-t-il dit, doit faire une « déclaration », une « profession de foi ».
 
C’est un signe de la gravité de la situation actuelle : en venir à demander à un souverain pontife, en l’occurrence le pape François, de redire sa foi en la doctrine immuable de l’Eglise est une manière de souligner qu’il le fait ordinairement de manière insuffisante, laissant penser qu’il ne la partage pas en tout point.
 
Mgr Bux n’y va d’ailleurs pas par quatre chemins : il n’hésite pas à dire que nous sommes « en pleine crise de la foi ».
 

Plus fort que les « Quatre Cardinaux » ? Mgr Bux dénonce les actions et paroles ambiguës du pape

 
Ainsi Edward Pentin résume-t-il son entretien avec le prélat : « Pour résoudre la crise actuelle dans l’Eglise concernant l’enseignement et d’autorité du pape, celui-ci doit faire une déclaration de foi, affirmant ce qui est catholique et corrigeant ses propres paroles et actions « ambiguës et erronées » qui ont été interprétées d’une manière non catholique. »
 
Sa première question portait sur « l’anarchie doctrinale » en cours et ses conséquences pour les âmes des fidèles et des prêtres. Réponse de Mgr Bux, qui ne contredit pas le constat :
 
« La première chose qu’implique l’anarchie doctrinale pour l’Eglise est la division, causée par l’apostasie, définie comme l’abandon de la pensée catholique par saint Vincent de Leris : quod semper, quod ubique, quod ab omnibus creditur (« ce qui a été cru partout, toujours et par tous »). Saint Irénée de Lyon, qui appelle Jésus-Christ le « Maître de l’unité », a souligné à l’intention des hérétiques que tous professent les mêmes choses, mais que chacun ne veut pas dire la même chose. Tel est le rôle du magistère, fondé sur la vérité du Christ : ramener chacun à l’unité catholique.
 

Mgr Nicola Bux rappelle que le pape doit affermir ses frères dans la foi

 
« Saint-Paul a exhorté les chrétiens à être en accord et à parler d’une voix unanime. Que dirait-il aujourd’hui ? Lorsque des cardinaux sont silencieux ou accusent leurs confrères ; lorsque des évêques qui ont pensé, parlé et écrit – scripta manent ! – d’une manière catholique, mais disent ensuite le contraire pour une raison quelconque ; lorsque des prêtres contestent la tradition liturgique de l’Eglise, alors l’apostasie s’établit : le détachement d’avec la pensée catholique. Paul VI avait envisagé que « cette pensée non catholique à l’intérieur du catholicisme devienne demain la plus forte. Mais elle ne représentera jamais la pensée de l’Eglise. Il faut que subsiste un petit troupeau, même si c’est un troupeau tout petit » (Conversation avec Jean Guitton, 9-IX-1977). »
 
Edward Pentin réitère sa demande : « Quelles sont donc les implications de l’anarchie doctrinale pour les âmes des fidèles et des ecclésiastiques ? »
 
Nicola Bux répond sous forme de mise en garde, montrant combien la question est important pour le salut éternel :
 
« L’Apôtre nous exhorte à être fidèles à la doctrine pure, certaine, et sûre : celle qui est fondée sur Jésus-Christ et non sur les opinions du monde (cf. Tite 1:7-11 ; 2:1-8). La persévérance dans l’enseignement et l’obéissance à la doctrine conduit les âmes vers le salut éternel. L’Eglise ne peut pas changer la foi et en même temps demander aux croyants d’y rester fidèle. Elle est au contraire intimement obligée de s’orienter vers la Parole de Dieu et vers la Tradition.
 
« Par conséquent, l’Eglise se souvient du jugement du Seigneur : « C’est pour un jugement que je suis venu dans ce monde, afin que ceux qui ne voient pas voient, et que ceux qui voient deviennent aveugles » (Jean, 9:39). N’oubliez pas que lorsqu’on est applaudi par le monde, cela signifie qu’on lui appartient. En réalité, le monde aime les siens et hait ce qui ne lui appartient pas (cf. Jean 15:19). Que l’Eglise catholique se souvienne toujours qu’elle n’est composée que de ceux qui se sont convertis au Christ sous la conduite du Saint Esprit ; tous les êtres humains lui sont ordonnés (cf. Lumen Gentium 13) mais ne font pas partie d’elle jusqu’à ce qu’ils sont convertis. »
 

Une interview de Mgr Nicola Bux par Edward Pentin

 
Edward Pentin demande, pour finir, comment ce problème peut être résolu.
 
Nicola Bux : « La question est celle-ci : quelle idée le pape a-t-il du ministère pétrinien, tel qu’il est décrit dans Lumen Gentium 18 et codifié dans le droit canonique ? Confronté à la confusion et à l’apostasie, le pape doit faire la distinction – comme l’avait faite Benoît XVI – entre ce qu’il pense et dit en tant que personne privée, érudite, et ce qu’il doit dire en tant que pape de l’Eglise catholique. Pour être clair : le pape peut exprimer ses idées en tant que personne privée érudite à propos des questions ouvertes qui ne sont pas définies par l’Eglise, mais il ne doit pas faire des affirmations hérétiques, même en privé. Autrement ce serait tout aussi hérétique.
 
« Je crois que le pape sait que tout croyant – qui connaît la regula fidei ou le dogme, qui fournit à chacun le critère pour savoir quelle est la foi de l’Eglise, ce que chacun doit croire et qui il faut écouter – peut voir s’il parle et œuvre de manière catholique, ou s’il est allé contre le sensus fidei de l’Eglise. Même un seul croyant peut l’appeler à prendre ses responsabilités. Ainsi, quiconque pense que le fait de présenter des dubia au pape n’est pas un signe d’obéissance, n’a pas compris, cinquante ans après Vatican II, la relation entre lui (le pape) et l’Eglise entière. L’obéissance au pape dépend seulement du fait qu’il est lié par la doctrine catholique, à la foi qu’il doit continûment professer devant l’Eglise.
 

« Le pape doit faire une déclaration ou une profession de foi »

 
« Nous sommes en pleine crise de la foi ! Par conséquent, afin d’arrêter les divisions en cours, le pape – tout comme Paul VI en 1967, confronté aux théories erronées qui circulaient peu après la conclusion du Concile – doit faire une déclaration ou une profession de foi, affirmant ce qui est catholique, et corrigeant les paroles et les actes ambigus et erronés – les siens et ceux des évêques – qui sont interprétés d’une manière non catholique.
 
« Sans quoi, il serait grotesque que tout en cherchant l’unité avec des chrétiens non catholiques et même une forme d’entente avec les non chrétiens, l’apostasie et la division soient favorisées à l’intérieur de l’Eglise catholique. Pour de nombreux catholiques, il est incroyable que le pape demande aux évêques de dialoguer avec ceux qui pensent différemment, mais qu’il ne veuille pas d’abord affronter les cardinaux qui sont ses principaux conseillers. Si le pape ne sauvegarde pas la doctrine, il ne peut imposer la discipline. Comme le disait Jean-Paul II, le pape doit toujours être converti, afin de pouvoir fortifier ses frères, selon les paroles du Christ à Pierre : « Et toi lorsque tu seras converti, affermis tes frères. » »
 

Jeanne Smits