La prise en charge des personnes âgées dépendantes, une bombe à retardement en Angleterre

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L’Angleterre n’est pas le pays le plus mal loti de l’Union européenne sur le plan de la natalité, avec 1,9 enfant par femme en moyenne au Royaume-Uni – moins qu’il n’en faut, toutefois, pour remplacer les générations. Mais malgré cela, et malgré un taux de chômage en deçà des 5,5 % au début de 2015, ses perspectives ne sont pas bonnes. Des décennies de soins et de prise en charge des personnes âgées socialisées ont créé une situation où la gabegie est omniprésente, et les listes d’attente et les mauvaises pratiques dans le cadre de la médecine gratuite et étatisée restent à l’ordre du jour. Un ancien ministre des Affaires sociales, Paul Burstow, vient de lancer un nouveau cri d’alarme pour ce qui est des personnes âgées dépendantes : une véritable « bombe à retardement », a-t-il averti, dans un contexte de soins médiocres et de demande croissante.
 
Il sera bientôt trop tard pour agir, a-t-il assuré après avoir participé à la rédaction d’un rapport qui devrait intéresser les pays voisins où la question de la population âgée dépendante prend partout des proportions inédites. Commanditée par un « think tank » sur les dépenses et l’organisation des autorités locales, le Local Government Information Unit, une commission d’enquête a constaté l’an dernier que le système, asphyxié sur le plan des subventions, fonctionne au ralenti au détriment des personnes âgées comme du personnel soignant. Aucune des mesures préconisées n’a été mise en œuvre, ou alors à « allure d’escargot », constate le nouveau rapport Burstow.
 

L’Angleterre compte 800.000 personnes âgées dépendantes en attente de prise en charge

 
Le rapport de l’an dernier proposait de plafonner les factures, de mieux organiser les paiements afin que les fournisseurs de services de risquent pas le dépôt de bilan et une « refondation » de la formation des soignants afin que leur carrière puisse devenir plus attirante.
 
En attendant, les vieillards britanniques font face un système à la fois coûteux et inefficace. Une même personne âgée peut recevoir la visite de jusqu’à 50 soignants différentes sur un an ; un véritable « défilé » que ne compense pas la qualité des soins puisque les visites à domicile sont souvent arbitrairement limitées à 10 ou 15 minutes qui ne permettent pas une prise en charge convenable.
 

La bombe à retardement du vieillissement démographique

 
Lesdits soignants, qui passent de nombreuses heures sur la route, ne sont pas convenablement défrayées et perdent encore en revenus parce que seul leur temps de travail effectif est pris en compte : certains d’entre eux travaillant à temps plein gagnent moins que le salaire minimum du Royaume-Uni.
 
A l’heure actuelle, 500.000 personnes âgées en Angleterre ne peuvent vivre chez elles que grâce à l’aide apportée par ces soignants souvent « démoralisés », rémunérés par les autorités locales ; 150.000 autres prennent elles-mêmes en charge le coût de leur maintien à domicile. Mais on estime à 800.000 le nombre de personnes âgées actuellement en demande de soins – un chiffre qui ne tient pas compte de la demande à venir, qui sera grossie par l’arrivée des enfants du baby boom à l’âge de la vieillesse.
 
Dans une tribune publiée par le Telegraph, Paul Burstow dénonce le manque de moyens du système comme une « fausse économie » dont le poids finit par retomber sur la NHS (National Health Service) lorsque les vieillards, atteignant un « point critique », appellent les services d’urgence.
 
Il souligne également un manque de personnel à prévoir à l’horizon 2020 : 200.000 personnes, pas moins, selon les estimations les plus optimistes. C’est une véritable armée qui manquera, et dont le financement pèsera sur les actifs.
 
Il faut ajouter ce qui n’est jamais dit ouvertement : à mesure que le système implosera, la tentation de l’euthanasie deviendra de plus en plus séduisante…
 

Anne Dolhein