Marche de l’Indépendance : mobilisation des Polonais face à ceux qui voulaient leur interdire de manifester leur attachement à la Pologne

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Un grand succès pour le centenaire de l’indépendance recouvrée de la Pologne : 250.000 patriotes ont défilé hier à la grande marche annuelle de Varsovie contre 60.000 l’année dernière, selon les chiffres de la police. Votre correspondant y était pour la troisième année consécutive, et il est clair que ces chiffres donnés par la police sont une estimation plausible, quoique prudente : les foules étaient probablement plus nombreuses encore. Il s’agissait en fait de deux marches qui se suivaient. La première, précédée par un petit défilé militaire, avançait derrière les dignitaires : le président Andrzej Duda, le premier ministre Mateusz Morawiecki, le leader du PiS Jarosław Kaczyński, etc. C’était la marche « Pour toi, Pologne » organisée par le gouvernement. Derrière, il y avait la marche coordonnée comme chaque année par la société civile, en l’occurrence par les milieux nationalistes, mais à laquelle se joignent des patriotes polonais de tous bords. Cette organisation avait été convenue au dernier moment après des négociations entre le gouvernement dirigé par les chrétiens-démocrates du PiS et l’association Marche de l’Indépendance constituée par plusieurs mouvements nationalistes. Le président et le premier ministre avaient en effet décidé de convoquer une marche officielle après l’interdiction de la marche des nationalistes par le maire de Varsovie, Hanna Gronkiewicz-Waltz, qui appartient au parti libéral-libertaire PO de Donald Tusk. Seulement, entre-temps, la justice polonaise a renversé l’interdiction du maire, y compris en appel samedi, c’est-à-dire la veille de la marche.
 

Deux marches en une

 
Cette double marche a certainement contribué à gonfler le nombre des manifestants, en attirant des gens qui ne souhaitaient pas jusqu’ici se joindre à une marche organisée par les nationalistes. La première réussite de la grande marche patriotique polonaise pour le centenaire de l’indépendance recouvrée est donc d’avoir réussi à unifier pour un jour les patriotes indépendamment de leurs préférences politiques, et ce malgré la campagne diffamatoire menée il y a un an et encore cette année par les gaucho-libéraux polonais et européens qui voudraient assimiler toute manifestation de patriotisme aux idéologies fasciste et nationale-socialiste (et qui oublient au passage de faire le lien entre national-socialisme et socialisme).
 

La grande marche patriotique, point d’orgue cette année des commémorations du centenaire de l’indépendance recouvrée de la Pologne

 
Le deuxième facteur ayant contribué à cette affluence encore jamais atteinte, c’était bien sûr le centenaire, dont la commémoration dure depuis le début de l’année et dont le 11 novembre était le point culminant. La journée de dimanche avait débuté le matin avec une messe pour la patrie présidée par le nonce apostolique Salvatore Pannachio. Le cardinal Kazimierz Nycz, archevêque de Varsovie, y prenait bien évidemment part, et le président de la Conférence des évêques et archevêque de Poznań, Mgr Stanisław Gądecki, y a prononcé une homélie en rapport direct avec le centenaire fêté ce jour-là. Entre autres paroles, l’archevêque a estimé que la Pologne avait perdu son indépendance il y a 223 ans parce que les Polonais s’étaient détournés de l’Évangile, et que cette même cause pourrait produire les mêmes effets à l’avenir. Il a alors cité la question des avortements eugéniques, qu’un projet de loi citoyen voudrait interdire mais sur laquelle la majorité parlementaire ne semble pas pressée de légiférer. L’archevêque a aussi parlé de l’importance pour une nation de cultiver son histoire, sans quoi elle risquait de cesser rapidement d’exister ou au minimum de former une communauté cohérente. Le président Andrzej Duda y était bien entendu avec son épouse ainsi qu’avec les principaux représentants du gouvernement et du parlement.
 
À midi, les commémorations se déroulaient dans le centre-ville avec une cérémonie devant la tombe du soldat inconnu, au terme de laquelle la foule a entonné l’hymne national avec le président, et la pose d’une gerbe de fleur devant la statue du maréchal Piłsudski, père de l’indépendance recouvrée de la Pologne. La grande marche patriotique de l’après-midi était donc cette année le point d’orgue d’une journée de commémorations et de festivités diverses que les représentants de l’opposition « libérale » la plus radicale, y compris le président du Conseil européen Donald Tusk qui venait de comparer le PiS aux Bolcheviques, n’ont pas réussi à empêcher ni même vraiment gêner.
 

Comment les gaucho-libéraux ont mobilisé massivement les Polonais pour l’édition 2018 de la Marche de l’Indépendance

 
Un troisième facteur a toutefois sans nul doute été déterminant pour provoquer l’affluence historique à la grande marche patriotique varsovienne de dimanche : les efforts du maire de Varsovie et de ses amis « libéraux » pour l’interdire et les insultes proférées l’année dernière au Parlement européen à l’encontre des participants à la Marche, notamment par l’eurofédéraliste belge Guy Verhofstad, chef du groupe ADLE, qui avait évoqué quelques jours après la marche dans son allocution de député « 60.000 fascistes dans les rues de Varsovie, des néo-nazis, des suprémacistes blancs (…) à Varsovie, en Pologne, à environ 300 km d’Auschwitz et Birkenau ». Déjà en 2010, l’extrême gauche et une certaine gauche libérale-libertaire rassemblée autour du journal Gazeta Wyborcza avaient tenté de bloquer la Marche de l’Indépendance qui réunissait chaque 11 novembre quelques centaines de nationalistes rendant hommage à Roman Dmowski, le leader politique des nationaux-démocrates polonais d’avant-guerre. Cette tentative avait causé l’indignation de plusieurs célébrités du monde politico-médiatique de droite, sans rapport avec les nationalistes, qui ont appelé les Polonais à venir défendre le droit de manifester des nationalistes et, plus généralement, le droit d’exprimer publiquement son patriotisme. C’est ainsi que la Marche de l’Indépendance a débordé des simples milieux nationalistes et s’est mise à attirer plusieurs dizaines de milliers de patriotes polonais chaque année. D’année en année, les provocations organisées par le gouvernement de Donald Tusk et les milieux d’extrême gauche n’ont fait qu’accroître la popularité de cette marche. Cette année, il s’est à nouveau passé la même chose qu’en 2010. Cette fois, ce sont le maire Hanna Gronkiewicz-Waltz et l’ex-premier ministre belge Guy Verhofstadt qui ont mobilisé massivement les Polonais pour défendre leur attachement à la patrie et à la liberté.
 

Olivier Bault

Correspondant à Varsovie