Sous les soixante dollars, la chute du pétrole s’accélère

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Le pétrole continue de connaître une chute vertigineuse qui inquiète de plus en plus les marchés. Son cours est passé jeudi sous le seuil psychologique des soixante dollars, et poursuivait son recul vendredi. Sur les marchés asiatiques – les premiers à ouvrir –, le baril WTI (standard américain) perdait – pour livraison en janvier – 86 cents, à 59,09 dollars. Le baril de Brent de la mer du Nord (qui est l’autre standard important sur les marchés) cédait pour sa part 52 cents à 63,16 dollars – pour livraison à même échéance –, après avoir déjà perdu plus de 40% sur les six derniers mois.
 
Très exactement, le prix du baril de pétrole a perdu 44% depuis le mois de juin, où il avait connu son dernier pic. Ce recul s’explique du fait d’une production mondiale excédentaire, alors que, dans le même temps, la conjoncture économique plombe la demande, spécialement en Europe et au Japon. Il y a notamment eu une hausse importante de la production américaine, que l’OPEP – et plus particulièrement l’Arabie Saoudite, suivie de l’Irak – a décidé de contrer en confirmant, fin novembre, sa décision de ne pas réduire sa production. Bien au contraire. Tout en baissant ses prix…
 

La chute du prix du pétrole va-t-elle s’enrayer ?

La situation se complique encore du fait que l’Agence internationale de l’énergie a abaissé, ce matin, sa prévision de croissance de la demande mondiale d’or noir pour 2015. Elle estime désormais que la consommation devrait croître de 900.000 barils par jour l’année prochaine, pour atteindre 93,3 millions de barils par jour, alors que son estimation précédente était de 93,6 millions.
 
Difficulté secondaire, mais dont il faudra tenir compte si la production continue à ce rythme quand les achats ne cessent de diminuer : le stockage, notamment dans les pays fragilisés de l’OCDE. L’Agence de l’énergie note ainsi que « les stocks pourraient y approcher 2.900 millions de barils et probablement se heurter aux limites des capacités de stockage ».
 
Même sans s’arrêter à ce dernier point, cette prévision de croissance révisée à la baisse contribue à une morosité générale des marchés, qui n’avaient déjà guère besoin de ce coup de frein supplémentaire.
 

A soixante dollars, l’inquiétude s’accélère partout !

 
Depuis jeudi, en effet, les places boursières ont réagi davantage encore à cette situation. Et notamment parmi les pays du Moyen-Orient, gros producteurs de pétrole. La bourse de Dubaï a subi l’une de ses plus grosses pertes quotidiennes (– 7,4%) en dix mois. Celle d’Abou Dhabi, deuxième marché des Émirats arabes unis, a chuté, elle, de 4,4%.
 
Mais les places boursières ne sont pas seules à subir de plein fouet la turbulence de l’or noir. Les industriels, de leur côté, ont augmenté leurs coupes dans les investissements – sans parler d’éventuelles diminutions d’effectifs. La spirale ne semble pas près de s’arrêter ! Ainsi BP, Statoil, ConocoPhillips et Chevron ont-elles annoncé, ces dernières semaines, tout à la fois une réduction de leurs investissements et la suspension de certains projets.
 
Ce sont en effet les producteurs américains qui souffrent le plus de cette guerre des prix, car les coûts d’extraction de gaz et de pétrole de schiste, qui constituent l’essentiel de leur production, se trouvent être désormais plus élevés que les prix de ventes actuels, sous soixante dollars. Selon les analystes cependant, l’équilibre entre l’offre et la demande devrait revenir au second semestre 2015. Mais c’est encore bien loin, surtout si le jeu baissier se prolonge…
 

Un équilibre à 100 dollars

 
Cela dit, les Américains ne sont pas les seuls, loin de là, à souffrir. Certains pays producteurs, pour qui l’or noir est une des composantes principales de l’économie nationale, estiment leur prix d’équilibre à quelque 100 dollars le baril. En l’état actuel, leur appréhension pourrait les amener – Nigeria, Venezuela, Lybie, Algérie et quelques autres… – à se retrouver les alliés objectifs des Etats-Unis pour réorienter les prix à la hausse.
 
Quoi qu’il en soit, cette inquiétude générale voit les investissements ne connaître qu’une progression de 5% cette année (à 734 milliards de dollars). L’Institut français du pétrole Énergies nouvelles vient d’annoncer qu’il s’agissait, de fait, de la plus faible depuis 2010…
Au final, il n’y a que l’automobiliste à être satisfait. Pour une fois, la chute du prix du pétrole se répercute de façon visible à la pompe quand il vient faire son plein.