DRAME/DRAME HISTORIQUE
Soleil de Plomb •


 
Soleil de Plomb (Zvizdan) est un film croate, à regarder impérativement en serbo-croate, car la langue participe évidemment de l’atmosphère. Ce drame comporte trois volets, situés en 1991, 2001, 2011. 1991 est l’année de l’éclatement de la guerre en Croatie, opposant forte majorité croate et petite minorité serbe. Cette dernière est fort concentrée localement, le long des frontières bosniaques et serbes, et approvisionné par l’armée yougoslave en cours de dissolution et à encadrement serbe à cette époque. 2001 est une des difficiles années de reconstruction : quelques réfugiés reviennent sur leurs terres dévastées ; tous les Serbes ont été expulsés lors de leur défaite de 1995, obtenue alors avec l’aide de l’OTAN. 2011 correspond à une année d’amnésie : les jeunes gens n’ont pas connu la guerre, ou ne s’en souviennent plus. Serbes et Croates partagent, avec des variantes régionales au plus, la même langue, et sont culturellement fort proches.
 
Un même couple d’acteurs d’une vingtaine d’année, interprète à chaque fois des personnages différents. Ils forment toujours un couple mixte, elle Serbe, lui Croate. Leurs personnages sont confrontés directement à la guerre, puis à des haines qui subsistent en 2001, ou même 2011. Il y a un message d’invitation à la réconciliation, à destination du public croate. Même s’ils ont commencé la guerre en 1991 (point de vue de Zagreb), les Serbes ont aussi considérablement souffert. Si un Croate a perdu son père, et une Serbe son frère à la guerre – cas du récit de 2001 –, la souffrance humaine est la même. Soleil de Plomb a conservé, ou à peu près, une unité de lieu pour l’action, le littoral croate et la Krajina, petite république sécessionniste serbe en 1991-1995, immédiatement voisine.
 

Soleil de Plomb exhibe une sexualité indécente

 
Pourquoi ces querelles entre gens si proches ? Historiquement, les Serbes sont orthodoxes et les Croates catholiques, d’où une séparation majeure, devenue incompréhensible dans l’Europe postchrétienne ; il n’en est d’ailleurs jamais question dans le film, même si de fait les uns comme les autres ont été très marqués par la sécularisation forcée sous des décennies de communisme (1945-1990). Il est à craindre que l’enfant symbolique du couple de la réconciliation, si difficile, de 2011, ne soit pas baptisé du tout. Cette réconciliation par le vide ne peut pas mener à une société harmonieuse à terme.
 
Il reste que l’ensemble de Soleil de Plomb s’avère de qualité, bien construit, souvent esthétiquement réussi et émouvant ; il montre les paysages naturels superbes de la côte dalmate, et ceux, bouleversants à leur manière, ruinés par la guerre. Cependant, nous déplorerons une faiblesse majeure : 5 à 10 minutes du film montrent une sexualité absolument indécente, ce qui nous interdit absolument de le recommander à un public catholique.
 

Hector Jovien

 
Soleil Plomb drame historique film croate