Nouveaux gadgets de stimulation cérébrale : des risques que leurs concepteurs préfèrent ignorer

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Avec le programme Dreem, la startup Rythm spécialisée dans les neurosciences et neurotechnologies, a développé un bandeau connecté destiné à améliorer les cycles de sommeil pour des capacités de récupération optimales. Elle vient de lever 10 millions d’euros de fonds.

 
L’obsession américaine pour le bien-être favorise l’émergence d’un nouveau type de produit électronique qui va bien au-delà des omniprésents bracelets fitness que portent les sportifs. La nouvelle technologie portative consiste, pour ainsi dire, à s’introduire dans votre cerveau, par le biais d’appareils aussi inoffensifs en apparence que des serre-tête ou des baladeurs un peu sophistiqués dotés d’électrodes. Ces gadgets ont prétendument la capacité de développer votre volonté, votre créativité et même de vous permettre de sauter plus haut (!). Un jour, affirment ses concepteurs, cette technologie de la stimulation cérébrale sera à même de vous apporter le saint Graal en matière d’émotion : le bonheur !… Les concepteurs préfèrent ignorer les risques associés à ces techniques. Plus grave : ils sont prêts à fabriquer un homme nouveau, l’homme artificiel « augmenté » dont rêvent les transhumanistes.
 
La technique consiste à stimuler des régions clef du cerveau avec des courants ou des champs magnétiques, pour jouer sur les émotions et le bien-être physique. La technique est voisine de la thérapie qui utilise des électrochocs pour traiter certains désordres psychiques, et de la manière dont la stimulation cérébrale est utilisée pour traiter, par exemple, la maladie de Parkinson. Des études récentes se sont d’ailleurs intéressées à ces techniques comme traitement possible de la perte de connaissance, de l’autisme ou de l’anorexie.
 

Les appareils de stimulation cérébrale comporteraient des risques

 
De nombreuses personnes et sociétés investissent dans cette technologie, depuis les capitalistes de la Silicon Valley jusqu’aux grandes firmes pharmaceutiques. Selon les start-ups qui vendent ces produits, cette technologie serait sans danger et basée sur des tests de contrôle sérieux. Pourtant, des recherches plus rigoureuses sont en cours et pointent déjà du doigt la manière dont les premières études ont été menées. Les appareils eux-mêmes n’ont pas été validés de manière indépendante, bien des entrepreneurs ne donnant que peu d’informations sur l’élaboration de leurs produits. Ceux-ci ont échappé jusqu’à présent au contrôle de la Food and Drug Administration, au prétexte que les courants qu’ils utilisent sont trop faibles pour être pris en compte par la FDA…
 
Un prétexte qui exaspère bien des experts en neurosciences, comme Kareem Zaghloul, qui dirige un laboratoire dédié au cerveau (au National Institute of Neurological Disorders and Stroke). Il affirme que ces appareils posent de sérieuses questions, aussi bien en ce qui concerne la manière dont ils affectent le fonctionnement du cerveau qu’à propos de l’incidence que pourrait avoir sur telle partie du cerveau le fait d’en stimuler une autre. Personne n’en connaît les conséquences à long terme : « Concernant le cerveau et la stimulation électrique, il existe toujours des dangers potentiels. Cela nous inquiète même dans le cadre de notre propre travail. Nous pensons que les risques sont assez faibles, mais des problèmes sont possibles » dit-il.
 

De nouveaux gadgets dont les concepteurs veulent ignorer les risques

 
Un groupe de chercheurs n’a pas hésité à écrire dans le journal Frontiers in Systems Neuroscience, que la stimulation cérébrale « non-invasive » peut paraître bénigne, mais qu’elle est associée à des risques aussi graves que ceux liés à une incision chirurgicale. Morom Bikson, professeur d’ingénierie biomédicale au City College de New York, insiste quant à lui sur le fait qu’il ne s’agit pas de « jouets » et que les utilisateurs trop réguliers risquent une overdose. D’autres questions, plus lointaines, sont liées à une addiction possible ou à un sabotage par des hackers qui modifieraient un code pour stimuler des caractéristiques indésirables comme l’anxiété, la crainte et l’agressivité.