Limitation de la vitesse à 30 km/h au Pays de Galles : des risques pour l’économie et les personnes

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Près de trois mois se sont écoulés depuis que la limite de vitesse nationale a été abaissée à 30 km/h sur les routes déjà limitées à 50 km/h, au Pays de Galles. Et les premiers effets n’ont pas tardé à se faire sentir. Le projet du Premier ministre Mark Drakeford concerne environ 35 % des routes du pays. Cette fois-ci, ce n’est pas le changement climatique qui est en cause, il faut bien varier les prétextes, mais l’économie qui serait faite en raison du nombre moindre de blessés et de morts… Sauf que les impacts financiers seront, in fine, parfaitement négatifs. Sans compter que les personnes elles-mêmes sont lésées, en raison du ralentissement des services.

 

Une vitesse d’escargot qui pollue davantage et freine les services

Pour résidents et entreprises, c’est le début des bilans, le premier étant que le bon sens est passablement négligé dans cette affaire… En témoignent les nombreux panneaux vandalisés, couverts de peinture par des justiciers opposés à la nouvelle réglementation des 30 km/h, un phénomène qui se généralise depuis l’expansion, cet été, à tout le Grand Londres de la fameuse zone à très faibles émissions ULEZ (Ultra Low Emission Zone).

Mais le Pays de Galles affirme que sa nouvelle réglementation n’a rien à voir avec une préoccupation écologique.

Pour les habitants, en tous les cas, la vie quotidienne a été quelque peu modifiée. Comme en témoigne ce pharmacien interrogé dans The Telegraph : « Les livraisons des stocks de nos fabricants de médicaments en gros arrivent une heure plus tard qu’auparavant. » Le délai pour approvisionner les patients confinés à domicile s’est donc allongé et le nombre de livraisons faites par sa pharmacie a diminué d’un tiers.

Et que dire de la population rurale, plus impactée encore par les temps de trajets. Cette bergère du Pembrokeshire ne peut plus conduire d’une traite ses troupeaux de brebis au lieu de reproduction spécifique à sa race ancienne. Il faut désormais compter une nuit supplémentaire, étant donné l’interdiction de faire voyager les animaux plus de huit heures d’affilée… « Je suis absolument dégoûtée du mépris qu’ils ont envers nous. Une voiture n’est pas un luxe, c’est un objet essentiel. »

Eh bien justement… cette dépendance est attrayante pour un gouvernement qui veut l’exploiter.

 

Climat ou mortalité : prétextes fallacieux

Pour tous ces gens, les 32 millions de livres sterling dépensés par l’administration décentralisée du Pays de Galles pour abaisser la limite de vitesse auraient pu servir une meilleure cause. L’Office for Statistics Regulator (OSR), l’organisme de surveillance des statistiques, a d’ailleurs critiqué l’affirmation du gouvernement gallois selon laquelle la limite de vitesse de 30 km/h n’ajouterait qu’une minute aux temps de trajet…

Quels arguments ont-ils déployé en faveur de cette mesure ? Toujours les mêmes, quoiqu’ils alternent, pour ne pas trop éveiller les esprits endormis. Ce n’est plus, là, une question de réchauffement climatique. C’est officiellement une question de sécurité : Mark Drakeford a affirmé que ses mesures protégeraient des vies et économiseraient au NHS (National Health Service) du Pays de Galles 92 millions de livres sterling par an.

Il est certain qu’il fallait trouver une autre idée que le climat, cette diminution de 20 km/h ne contribuant aucunement à réduire les émissions d’échappement, comme plusieurs études sur des projets similaires l’ont prouvé. Pire, il semblerait que cela puisse faire l’inverse, les ralentissements engendrant davantage d’émissions du fait, par exemple, d’utiliser des rapports inférieurs en montée, et des bouchons de circulation qui s’ensuivent.

Mais, même sur la sécurité routière, c’est une entourloupe. Le passage de 50 km/h à 30 km/h avait déjà été expérimenté sur plusieurs portions de routes au Pays de Galles : l’étude accidentogène avait montré qu’il y avait eu le même nombre de morts et davantage de blessés… Le constat fut d’ailleurs similaire, en France, avec cette fameuse histoire des 80 km/h : on a d’ailleurs pu apprécier le retour en arrière de bon nombre de départements.

 

La limitation… de son économie par le Pays de Galles

Cette limitation de vitesse n’est pas sans annoncer la prochaine lubie du gouvernement gallois, à savoir la mise en œuvre de restrictions de type ULEZ sur les véhicules en dehors des villes. L’administration travailliste de Mark Drakeford voudrait en effet introduire des « zones d’air pur » sur l’autoroute M4 ainsi que sur des centaines d’autres routes. Les conducteurs seront potentiellement contraints de payer jusqu’à 8 £ (10 €) par jour, suivant la « propreté » leur véhicule, pour circuler dans ces zones à péages routiers où la pollution serait jugée trop élevée.

Les deux mesures n’auraient rien à voir, prétend le gouvernement… Si, en ce que, sous des prétextes différents, elles participent au même mouvement de réduction des richesses et de diminution des libertés individuelles.

Car, avec l’imposition de ces 30 km/h, le parti travailliste pourrait faire perdre à l’économie galloise plus de 4 milliards de livres sterling au cours des trois prochaines décennies, selon l’analyse de l’évaluation d’impact commandée par le gouvernement. Et le secteur des entreprises, y compris les chauffeurs-livreurs, pourrait subir une perte supplémentaire de 1,6 milliard de livres sterling.

Bizarrement, on n’a entendu parler que des économies que réaliserait le NHS via la police, les hôpitaux et les ambulances… Ce qui a permis à un député conservateur d’accuser l’administration de « ne pas avoir dressé un portrait financier complet » lors de la promotion de ce programme, le premier, au demeurant, du Royaume-Uni…

Réduire, ralentir, niveler. Tel est l’objectif récurrent comme le disait Anne Dolhein, pour mettre les pays du Nord au diapason de ceux du Sud. En témoigne également le grand programme en cours de réévaluation immobilière dans ce même Pays-de-Galles, aux fins de la taxe d’habitation, « pour rendre la fiscalité plus équitable ». Si un peu plus de la moitié des propriétés verront leur facture réduite, les autres la verront augmenter, et de manière exponentielle pour les plus riches.

Comme le sentiment d’avoir déjà vu ça quelque part…

 

Clémentine Jallais