Au Pays de Galles, un magistrat démissionne pour ne pas appliquer la nouvelle limitation de vitesse

Galles magistrat limitation vitesse
 

Un geste pour l’exemple. Nicholas Colbourne, 66 ans, ancien officier de police et conseiller de comté depuis près de 20 ans, a démissionné de ses fonctions pour montrer son opposition à la loi sur la limitation de vitesse qui vient d’entrer en vigueur au Pays de Galles. Ce dernier est devenu le premier pays du Royaume-Uni à réinitialiser la limite de vitesse par défaut pour les routes locales, en imposant partout 30 km/h (20 mph). Le magistrat refuse d’imposer des amendes aux automobilistes en vertu d’une loi aussi ridicule et injustifiée.

 

300 euros et 3 points : l’ire du magistrat

Le magistrat gallois évoque un « malaise » bien réel. « Je n’ai aucun problème avec les limites de 30 km/h autour des écoles, des maisons de retraite, avec des personnes sortant en fauteuil roulant, dans certains lotissements. [Mais] une interdiction générale pour l’ensemble de la nation est tout simplement ridicule », a déclaré M. Colbourne au Daily Telegraph.

D’autant que les amendes sont à la hauteur du scandale : les personnes reconnues coupables d’excès de vitesse devront payer un total de 250 £, soit presque 300 euros, et trois points seront retirés de leur permis. « Je ne vais pas m’asseoir devant le tribunal et dire que quelqu’un doit payer 250 £ et sacrifier trois points sur son permis pour avoir roulé à 38 ou 40 km/h, je ne fais pas ça. »

« Cela frappe les automobilistes ordinaires au porte-monnaie. 250 £, c’est considérable pour beaucoup de personnes vivant sous le seuil de pauvreté, j’en suis consterné. Ce n’est pas le but d’un tribunal », a-t-il déclaré.

L’ancien officier et conseiller était affilié au parti travailliste gallois… Il se dit aujourd’hui « complètement déçu ».

 

Un « changement majeur » au Pays de Galles pour peu d’effets

La nouvelle loi est entrée en vigueur le 17 septembre, malgré une pétition record et la fureur des conducteurs : plusieurs opérations escargots auront encore lieu samedi 28 octobre sur les axes principaux du Pays de Galles. Elle a été imposée sans consultation aucune. Même la pétition en ligne qui a rassemblé plus de 460.000 signatures, représentant donc près d’un Gallois sur 6, n’a pas été entendue par le Premier ministre Mark Drakeford qui a maintenu le changement, tout en assurant qu’il la prenait au sérieux…

Les arguments avancés ? Sauver des vies, éviter des blessures, « rendre nos communautés plus sûres pour tout le monde, y compris les automobilistes ». Sauf qu’en septembre, il a été rapporté via une étude réalisée par Transport for Wales, l’opérateur de transport du pays, que la limitation à 30 km/h en lieu et place des 50 km/h ne réduisait effectivement la vitesse des automobilistes que de 5 km/h…

Ce qui met beaucoup à bas les démonstrations des défenseurs du projet qui parlaient d’économiser 92 millions de livres sterling par an et de réduire le nombre de morts jusqu’à 100 et le nombre de victimes jusqu’à 20.000 sur une décennie… Ils oblitèrent le coût économique d’une telle mesure. Et puis surtout, si l’on entre dans cette logique, pourquoi s’arrêter, pourquoi ne pas atteindre l’objectif zéro mort de la circulation, comme zéro carbone ? Il suffit que tous roulent à zéro à l’heure !

En revanche, avec 30 km/h, place à l’allongement des trajets, des bouchons, aux retards pour les interventions d’urgence, et aux retards des bus… Un professeur d’université britannique a parfaitement résumé l’enjeu : « Un changement culturel ambitieux qui éloigne les populations de la domination de la voiture. » Place à la décroissance. Et ne pensez pas que la voiture électrique y changera quelque chose : selon un porte-parole du gouvernement gallois, elle produit toujours « une pollution particulaire »…

 

Une politique britannique contre la limitation de vitesse ?

Il est vrai que telle n’est pas la politique nationale de la Grande-Bretagne puisque le gouvernement britannique envisage justement, à l’inverse, de restreindre la capacité des conseils locaux à imposer des limitations de vitesse à 30 km/h, dans le cadre d’un nouveau changement de politique contre les mesures écologiques et les schémas d’apaisement de la circulation.

Le gouvernement conservateur travaille désormais, sur ce sujet, contre les lubies du parti travailliste. Même si, il faut le reconnaître, cette politique anti-voiture a d’abord été introduite par le conservateur Boris Johnson. Mais les intérêts sont en partie électoralistes : la population est, entre autres, bien préoccupée concernant l’extension de la zone à faibles émissions ultrabasses du Grand Londres par le maire travailliste Sadiq Khan : le plan ULEZ.

Seulement, ce choix du gouvernement britannique de limiter l’expansion des 30 km/h ne s’appliquera ni au Pays de Galles qui vient de faire entrer vigueur sa loi, ni en Ecosse qui fera de même en 2024. Car ces deux nations britanniques bénéficient d’une délégation de compétence en matière de vitesse. Et peuvent décider de manière indépendante de prendre une décision qui en dernière analyse, revient à ralentir l’économie.

 

Clémentine Jallais