Le Royaume-Uni face à la menace du pain grillé et des pommes de terre rôties

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Pommes sarladaises

 
En attendant le Brexit, les directives européennes sont encore en vigueur au Royaume-Uni (et risquent de le rester longtemps compte tenu de la transcription des règles dans le droit britannique). Parmi elles, un nouveau texte concernant l’hygiène alimentaire ouvre la voie à la traque des aliments trop grillés, du pain aux pommes de terre rôties en passant par les frites et autres denrées susceptibles de présenter un trop fort taux d’acrylamide, cette substance qui se forme lorsque les pommes de terre et les céréales sont cuites à plus de 120 °C. Bref, c’est le croustillant que l’on pourchassera, au motif qu’il est cancérigène. Les Anglais ont réagi avec horreur (et humour), prêts à prendre la défense de leurs toasts et de leurs chips face à un Etat-nounou de plus en plus envahissant.
 
Il faut dire que les tests qui ont justifié des mesures drastiques de la part de l’Union européenne ont été faits… sur des souris. Souris dont le régime habituel ne comprend pas la rôtie du matin, avec ou sans confiture. En réalité, la tartine trop dorée ou la sarladaise grillée à point n’ont pas démontré scientifiquement leur nocivité pour l’être humain : les tests ne parlent que de probabilités d’après des expériences sur les petits rongeurs.
 

La guerre du pain grillé et des pommes terre trop rôties

 
Parmi les mesures annoncées, le Daily Telegraph croit savoir que les pubs et autres restaurants pourraient, lorsque la directive sera retranscrite à la fin de 2017, se voir mettre à l’amende pour les plats trop brunis. Que ce soient les frites ou les pâtes à pizza, des minutes de cuisson en trop justifieront des poursuites. On imagine déjà une cohorte d’inspecteurs de la Food Standards Agency, armés de nuanciers pour vérifier la coloration d’une pâte ou d’une pomme de terre sautée. Car oui, les nuanciers existent. Pour être un bon citoyen, il faut consommer son pain grillé tout mou, à peine coloré. Même chose pour les frites…
 
« Vous aimez ce qui est bon ? C’est très mauvais », prévenait déjà la sœur acariâtre de La Grande Vadrouille. La réplique n’a jamais perdu de son actualité, mais la voilà poussée à l’absurde. Cela fait des décennies que les menus plaisirs de la vie sont dénoncés, tandis que les grands désordres ont leur Gay Pride… On est loin du médecin mettant en garde son patient diabétique contre le sucre, ce sont aujourd’hui les gouvernements qui veulent contrôler chaque bouchée : du moment que ce n’est pas une bouchée pour papa et une bouchée pour maman, schéma désespérément homophobe, il faut s’imposer la nouvelle moralité hygiéniste. Mais même temps, la légalisation du cannabis est en marche…
 

Le Royaume-Uni, cet Etat-nounou qui filtre le moucheron et avale le chameau

 
La twittosphère britannique s’amuse, tant qu’il est encore temps. On fait ses adieux à la vie en avalant une bouchée de pain grillé ; on invente de nouveaux hashtags, façon #toastquitue, et des scientifiques sont montés au créneau pour dire qu’il faudrait des décennies pour achever un homme à coups d’acrylamide, d’autant qu’il ne s’agit en général pas du seul aliment dans les assiettes.
 
A quand des grille-pain bridés et des friteuses connectées aux services de santé ?
 

Anne Dolhein