L’argumentaire contre la viande balaye tout le spectre du politiquement correct arc-en-ciel. Elle est grasse, bouche les artères, donne du cholestérol, fait grossir et mourir de maladie de cœur ou de cancer. Elle est emblématique, via les barbecues, du patriarcat le plus machiste. Elle demande beaucoup plus d’eau et d’énergie que les plantes pour la même valeur nutritive. Le bétail contribue ainsi au déboisement et aux émissions de CO2, sans compter les pets de vache. En plus, on élève des êtres vivants pour les consommer, dans des conditions de vie et de mort souvent innommables. Mais ces arguments médicaux, moraux ou environnementaux ne convainquent pas toujours des populations qui aiment la viande et sont attachés à leurs habitudes culinaires. Aussi une étude publiée par l’Université de Durham au Royaume-Uni préconise-t-elle pour hâter le mouvement une présentation dissuasive de la viande, avec des images aussi dégoûtantes que celles qu’on voit sur les paquets de cigarettes.
La viande accusée de tous les maux
L’étude s’intitule : « Améliorer la santé publique et réduire l’empreinte carbone du Royaume-Uni. » Publiée dans la revue scientifique britannique Appetite, elle se propose d’observer « l’incidence des étiquettes pédagogiques sur la sélection des repas de viande ». Le parti-pris des chercheurs contre la viande « enracinée dans la société occidentale », n’hésitant pas à affirmer, a priori, sans l’établir le moins du monde, qu’elle a de mauvais effets sur la santé et même que la consommation de viande « contribue aux pandémies ». Et de reprendre comme du bon pain des chiffres sortis de nulle part (90.000 morts liés à la pollution engendrée par la production de viande en Chine, 13.000 aux Etats-Unis, 12 à 18 % des émissions anthropogéniques de gaz à effet de serre causées par le bétail, etc).
Les images dégoûtantes enlèvent l’envie de viande
Après la confession obligatoire du dogme vient l’étude proprement dite. Elle a été menée sur 1.001 adultes devant s’imaginer choisir entre quatre options : viande, poisson, végétarien, vegan. Puis on montre la photo d’une attaque cardiaque avec le message : « Manger de la viande est mauvais pour la santé. » Le choix du menu carné a baissé de 8,8 %. On montre ensuite un paysage incendié avec la mention : « Attention : manger de la viande contribue au changement de climat. » 7,4 % supplémentaires ont choisi l’option sans viande. Une troisième photo avec un plat exotique et une mise en garde contre les pandémies a provoqué une baisse de 10 % du menu carné.
Bientôt un cancer sur votre entrecôte comme sur votre paquet de cigarettes ?
Le patron de l’étude de l’Université de Durham, tout en concédant hypocritement que ce n’est pas à lui de recommander quoi que ce soit aux restaurateurs ou à la puissance publique n’a pu s’empêcher de faire cette constatation : « Puisque les étiquettes pédagogiques et la publicité dissuasive ont prouvé leur efficacité dans la réduction du tabac, de l’alcool et des boissons sucrées, une signalétique des repas contenant de la viande pourrait nous aider à réduire la viande, si c’était le résultat d’une politique publique. » A demain, donc, pour des photos d’obèses mourant d’un cancer du colon ou de tsunami déferlant sur des terres désertifiées, élégamment piquées sur nos entrecôtes, comme toutes les horreurs que l’on peut voir aujourd’hui sur les paquets de cigarettes. Telles sont les douceurs du totalitarisme post-moderne.