Elections aux Pays-Bas :
La Turquie menace l’Europe d’une invasion de migrants

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En conclusion de sa crise diplomatique avec l’Allemagne et les Pays-Bas, la Turquie menace l’Europe de rompre l’accord de 2016 sur les migrants. Une façon de s’ingérer dans les élections néerlandaises, en suggérant que tout signe de fermeté, et la victoire du populiste Wilders, provoquerait par contrecoup l’invasion du continent.
 
Le théâtre de l’absurde atteint son sommet entre la Turquie et les Pays-Bas. Premier acte, deux ministres turcs prétendent tenir meeting aux Pays-Bas en faveur d’Erdogan dans la campagne pour le prochain référendum en Turquie. Deuxième acte, le gouvernement néerlandais refuse, et, les ministres persistant, en expulse un et interdit l’autre d’accès au territoire. Troisième acte, Erdogan convoque l’ambassadeur des Pays-Bas, qui est rappelé à la Haye.
 

La Turquie menace de traîner en justice les Pays-Bas

 
Depuis, les choses se sont encore envenimées : la Turquie annonce que l’ambassadeur néerlandais ne pourra pas revenir à Ankara, et ferme les frontières aux citoyens des Pays-Bas, les manifestations de protestation des Turcs des Pays-Bas contre les « mauvais traitements » subis par leur ministres sont réprimées sans faiblesse, avec canons à eau et chiens policiers, ce qui provoque l’accusation de « nazisme » de la part d’Erdogan, qui menace de traîner les Pays-Bas devant la Cour européenne de justice. Angela Merkel s’étant solidarisée avec les Néerlandais et ayant interdit un meeting à Hambourg, elle se trouve englobé dans l’accusation. Les appels de Johannes Hahn, commissaire à l’élargissement de l’UE à « se garder de déclarations et d’actes excessifs » et de Jens Stoltenberg, secrétaire général de l’OTAN (Otan dont la Turquie est le pilier en Méditerranée orientale) à « montrer un respect mutuel et rester calme », ne pèsent pas bien lourd dans une telle ambiance.
 

Kurtumulus menace l’Europe de rompre l’accord sur les migrants

 
En Turquie, les plus hauts responsables se déchaînent. L’un des vice-premiers ministres, Noureddine Canikli a traité l’Europe « d’homme vraiment malade ». Un autre, Numan Kurtumulus, qui est aussi porte-parole du gouvernement a brandi une menace présentée presque comme un fait acquis : du moment que « l’Europe ne tient pas ses promesses sur l’accord sur les migrants, pour nous cet accord est caduc », ce qui permettrait à la Turquie d’ouvrir grande sa frontière avec la Grèce au flux sortant des migrants. Nul ne sait à quoi Kurtumulus fait référence en parlant de « promesses » non tenues, mais sa menace est claire, d’autant qu’il rejette sur l’Europe toute la responsabilité de la « crise profonde » qu’il déplore. Et Recep Erdogan en a rajouté une couche en répétant : « Je croyais que le nazisme était mort, mais j’avais tort. En fait, le nazisme est bien vivant à l’Ouest ».
 

A l’Ouest, du nouveau : le nazisme

 
Que penser la comédie frénétique qui se joue ainsi ? D’abord, il faut relever le terme « à l’Ouest ». Il est probable que le processus d’entrée de la Turquie dans l’Union européenne est arrêté, d’une part, de l’autre, que le retournement stratégique constaté avec l’accord Poutine-Erdogan sur la Syrie se confirme, la Turquie se détournant de l’Occident, ce qui explique le souci du secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg. Les politologues spécialistes de la Turquie mettent aussi en lumière le souci de politique intérieure qui anime Erdogan : il entend à la fois représenter l’honneur de la Turquie et les valeurs de l’islam contre une Europe à ses yeux abusive pour engranger le plus de voix possible. Il y a sans doute aussi un plaisir pervers de rhétoricien chez lui, qui a été traîné dans la boue par les médias européens et singulièrement allemands, pour avoir manqué aux droits de l’homme dans plusieurs affaires journalistiques, à retourner aux dirigeants de l’Europe le mot qui a le statut d’insulte absolue dans leur système : nazisme.
 

La menace de l’invasion pèse sur les élections

 
Mais ne voir en Erdogan qu’un nationaliste musulman (si ce terme a un sens) serait réduire le personnage et sa fonction. En fait, les économies de la Turquie et des Pays-Bas sont fortement imbriquées (les Néerlandais sont les premiers investisseurs en Turquie, les Pays Bas sont le dixième marché à l’export pour la Turquie), et il ne semble pas probable que la Turquie sorte de l’OTAN. Les gesticulations actuelles me semblent devoir entrer, avec le Brexit, dans la NEP mondialiste, qui donne un peu d’oxygène aux peuples et leur permet d’exprimer leurs colères : la Turquie n’entrera pas dans l’Europe. Elle sert néanmoins d’épouvantail contre la tentation populiste. Le message tombe en plein milieu des élections législatives aux Pays-Bas et peut se résumer ainsi : vous voyez le tohu-bohu qu’a provoqué un mince geste de fermeté de la part du gouvernement néerlandais, alors, qu’est-ce que ce serait si Geert Wilders l’emportait ! C’est toujours le même argument qui est utilisé : la peur. Erdogan joue sa partition dans le concert mondialiste contre le populisme.
 

Les Pays-Bas, la Turquie et l’Europe jouent la comédie

 
Ce qui rend toute cette comédie encore plus absurde et encore plus tragique, c’est que bien sûr le gouvernement néerlandais a raison d’interdire à des ministres étrangers de venir faire campagne sur son territoire, bien sûr il est dans son droit de réprimer le manifestations de rue d’étrangers qui protestent contre sa décision souveraine : mais ce sursaut de bon sens est purement démagogique, il ne vise qu’à paraître ferme pour empêcher les électeurs de se porter en masse sur Wilders, et s’inscrit contre toute la politique menée depuis des décennies par les dirigeants des Pays-Bas et de l’Europe, qui a consisté précisément à ouvrir le frontières à l’invasion et à abandonner la souveraineté des nations. Si des ministres font le voyage de Turquie en Allemagne et aux Pays-Bas pour tenir meeting, c’est que c’est rentable pour eux, donc qu’il y a un bassin d’électeurs suffisant, donc une masse d’immigrés importante : les responsables n’en sont pas Erdogan ni même la Turquie, mais les politiciens qui ont ouvert leurs frontières à l’invasion. Erdogan a parlé de nazisme : à quand un Nuremberg du mondialisme ?
 

Pauline Mille