Le dissident chinois Chen Guangcheng n’a pas hésité à accuser le Vatican de pactiser avec le diable alors que le Saint-Siège s’apprête à s’entendre avec les communistes sur le dos de l’Église catholique de Chine restée fidèle à Rome. « La Chine ne s’est en rien amélioré par rapport à ce qu’elle était à l’époque de Jean-Paul II ; au contraire, c’est le pape François qui est très différent du pape Jean-Paul II », assure-t-il pour expliquer cette nouvelle orientation de l’Eglise. Alors qu’un accord entre le Vatican et les communistes chinois sur la reconnaissance de « l’Église patriotique » inféodée au régime et sur la nomination commune des évêques est annoncé comme proche, la réponse du dissident chinois Chen Guangcheng aux propos de Mgr Marcelo Sanchez sur une Chine censée être celle qui met le mieux en œuvre la doctrine sociale de l’Eglise est cinglante. « On ne peut pas penser que la Chine d’aujourd’hui soit celle de Jean-Paul II, ou la Russie celle de la Guerre froide », avait en effet déclaré le prélat argentin proche du pape François.
Chen Guangcheng est l’un des dissidents chinois les plus connus dans le monde. Aveugle depuis l’enfance et juriste autodidacte, il fut jusqu’à sa fuite de Chine persécuté par le régime communiste pour sa défense de la cause des femmes stérilisées de force ou contraintes à avorter. Assigné à résidence en 2010 après avoir fait de la prison, il s’évada et se réfugia à l’ambassade des Etats-Unis à Pékin en 2012, puis parvint à s’exiler aux États-Unis après des tractations entre Washington et Pékin.
Le dissident Chen Guangcheng rappelle au Vatican la véritable nature de la Chine communiste
Dans un texte au vitriol qui fait écho aux propos tenus par le cardinal Zen, évêque émérite de Hong Kong, Chen Guangcheng rappelle la vraie nature des communistes chinois, leur athéisme et leur absence de limites morales, les tortures et les persécutions des opposants, le nombre incommensurable de meurtres commis et leur mépris total pour la vie humaine. Un mépris qui se reflète dans la violence du « planning familial » à la chinoise, le Parti communiste chinois (PCC) ayant tué entre 360 et 400 millions d’enfants à naître au cours des trois dernières décennies. Chen Guangcheng évoque encore les très nombreux enlèvements de citoyens par les autorités, la pratique courante de l’emprisonnement arbitraire et de la torture dans la Chine d’aujourd’hui.
Si le Vatican a rompu ses relations diplomatiques en 1951 avec la Chine de Mao, c’est parce que « le PCC voulait tout contrôler, y compris Dieu », insiste le célèbre dissident. « Après 67 années de blocage par le Parti communiste chinois, le Vatican a abandonné ses principes et accepte désormais le leadership du PCC. »
L’Eglise avait pourtant rompu ses relations diplomatiques avec la Chine de Mao en 1951
Puis Chen Guangcheng répond spécifiquement à Mgr Marcelo Sanchez Sorondo, le chancelier de l’Académie pontificale des sciences sociales qui voit en la Chine communiste un modèle d’application de la doctrine sociale de l’Église. Chen demande s’il est possible d’être aussi naïf et explique, exemples à l’appui, où se cache la pauvreté que le prélat argentin n’a pas vue en Chine, quelle est l’ampleur réelle des trafics de drogue dont le dissident chinois a seulement pris conscience lors de son séjour en prison en compagnie de trafiquants et de dealers, et dans quelles conditions les Chinois honnêtes doivent travailler pour vivre.
Après un séjour à Pékin, l’évêque avait au contraire raconté : « J’ai rencontré une Chine extraordinaire ; ce qu’on ne sait pas, c’est que le principe central chinois est le travail, le travail, le travail. Il n’y en a pas d’autre : au fond c’est comme le disait saint Paul – que celui qui ne travaille pas, ne mange pas. On n’y trouve pas de villes-misère, pas de drogue, les jeunes ne se droguent pas. Il y a comme une conscience nationale positive, ils veulent démontrer qu’ils ont changé, ils acceptent déjà la propriété privée. » Un enthousiasme qui n’est pas sans rappeler celui du mondialiste américain David Rockefeller après un séjour dans la Chine de Mao en 1973, alors que la sinistre Révolution culturelle durait encore. Rockefeller avait même conclu son apologie du communisme chinois par l’affirmation : « L’expérience sociale conduite en Chine sous la direction du président Mao est l’une des plus importantes et des plus réussies de l’histoire de l’humanité. »
L’enthousiasme déphasé d’un évêque argentin proche du pape François a soutenu les négociations Rome-Pékin
Aujourd’hui, écrit Chen Guangcheng, les atrocités commises par le PCC atteignent leur pire niveau depuis l’époque de Jean-Paul II. Les communistes intensifient leur contrôle totalitaire sur la société chinoise et leurs persécutions à l’encontre des « défenseurs de la démocratie, des libertés, y compris religieuses, et des droits de l’homme ».