Le pape François baptise au Vatican les enfants de Lucas Schaerer, vieil ami argentin : un événement politique

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Voyage éclair pour une famille argentine : Lucas Schaerer, sa femme Ana et une amie journaliste, Mercedes Ninci ont passé 5 jours à Rome du 5 au 10 août, convoqués pour le baptême des filles du couple par le pape en personne. Lucas Schaerer fait partie de ces vieux amis du pape engagés dans la lutte contre la corruption, la mafia, le narcotrafic et la prostitution au sein de l’ONG La Alameda. Le pape a célébré la messe dans la chapelle de Sainte-Marthe et s’est ensuite entretenu seul avec le groupe venu exprès de Buenos Aires. Un événement politique, malgré les apparences !
 
La presse argentine s’émeut de cette rencontre familiale et familière, sans une ombre de protocole. On a appris – par Mercedes Ninci, journaliste, choisie comme marraine de la petite Simona – que le pape avait lui-même promis de baptiser le nouveau-né lorsque ses amis Lucas et Ana lui avaient envoyé une image de la première échographie de leur enfant à naître.
 

Baptême à Sainte Marthe : le pape François fait venir son ami argentin Lucas Schaerer et sa famille

 
Avant de quitter Buenos Aires pour devenir pape, il paraît même que François – qui était encore le cardinal Bergoglio – avait encouragé Lucas Schaerer à « devenir curé » : le jeune homme n’avait pas suivi et devait se marier un peu plus tard avec Ana, militante comme lui de La Alameda.
 
Tout s’est passé très vite lorsque la petite fille du couple est venue au monde. A la demande du pape François, il a fallu organiser très rapidement un déplacement à Rome ; c’est le pape qui leur a trouvé un logement dans une maison religieuse accueillant des pèlerins pour le groupe dont faisait également partie, semble-t-il, Gustavo Vera, député, président de La Alameda, initiateur d’un mouvement de quartiers lors de la grande crise argentine en 2001, et parrain lors de la cérémonie de samedi à Sainte-Marthe.
 
Une bien jolie histoire… Mais qui pose quelques questions. Celle du CO2, des dépenses énergétiques, des dépenses tout court encourues pour que tout ce petit monde se rende à Rome. Pour faire baptiser son enfant par le pape, cela peut sembler très légitime. Mais n’est-ce pas le pape lui-même qui invite à modérer son train de vie, à limiter les déplacements ?
 
Points positifs : la volonté du pape de baptiser la petite Simona rapidement après sa naissance, à quoi s’ajoute le fait qu’il a baptisé la fille qu’avait déjà Ana de son côté : Charo, 9 ans. Elles sont devenues enfants de Dieu, c’est l’essentiel.
 

Le pape baptise les enfants de militants politiques

 
Mais on ne peut s’empêcher de poser la question du sens politique de cette invitation et de ce voyage. Le pape François, déjà en tant que cardinal Bergoglio, s’est montré très proche du mouvement La Alameda qui joue un rôle politique certes marginal, mais très affirmé en Argentine. L’ONG s’est associé avec d’autres mouvements, parmi lesquels la Démocratie chrétienne et le syndicat ouvrier argentin CGT – seul officiellement représentatif – pour créer le parti du « Bien commun ». Il a été fondé fin 2014 par Gustavo Vera, proche du cardinal Bergoglio qui a continué de rencontrer régulièrement le pape François depuis que celui-ci a été élu à la chaire de Pierre.
 
Le nom du parti s’inspire d’ailleurs d’une petite phrase de Bergoglio : « Le pouvoir est bien commun. Lorsqu’il devient un bien propre il est corruption. »
 
Vu tout ce qui précède, il est difficile de ne pas considérer le baptême de samedi comme une prise de position politique, une déclaration appuyée d’affinité. Avec, au demeurant, de multiples thèmes développés dans le cadre du discours écologique du pape et ses charges contre l’esclavage moderne, deux sujets que le pape François et ses proches lient étroitement et font traiter au cours de réunions communes.
 

Un événement politique orchestré par le pape François

 
La journaliste Mercedes Ninci a raconté sa visite à Rome dans la presse, soulignant combien elle avait été touchée de voir le pape faire son entrée seul, sans « l’entourage » qui accompagne habituellement les puissants : « Il est si simple, tellement dévoué au peuple, si détaché du pouvoir ! » Elle a également rapporté le propos pontifical qui l’avait le plus touchée : « Pour gagner une guerre, il ne faut pas la commencer. »
 
Il devait le répéter le lendemain lors de l’Angelus : « Avec la guerre, on perd toujours. La seule façon de gagner une guerre est de ne pas la faire. » Yves Daoudal réagit ici à cette étrange déclaration, soulignant combien elle s’éloigne de la doctrine traditionnelle de l’Eglise.
 

Anne Dolhein