L’appel de cardinaux, de patriarches et d’évêques à la COP21 pour l’adoption d’un accord sur le climat

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A peine les trois semaines de synode sur la famille étaient-elles terminées que plusieurs cardiaux, patriarches et évêques du monde entier ont lancé à Rome un appel à la COP21 afin que les négociations de Paris débouchent sur « un accord équitable et juridiquement contraignant sur le climat ». Le texte de leur appel en dix points a aussitôt été publié dans le cadre du bulletin quotidien de la Salle de presse du Vatican : c’était une initiative des plus officielles, impulsée par la Secrétairerie d’Etat du Vatican et menée sous les auspices du Conseil pontifical Justice et Paix.
 
On est d’emblée saisi par le contraste : cet appel, qui constitue une ingérence dans la vie politique et laïque, n’est pas le fruit d’une quelconque collégialité, à l’inverse des discussions synodales qui faisaient au moins mine de donner la parole à chacun et qui de fait ont été infléchies par la volonté de nombreux pères synodaux. En outre, l’appel de ces prélats est extrêmement directif, il n’entre pas dans la logique d’une Eglise qui « écoute » et qui prend la société telle qu’elle est : non, il est clairement question de changer la société puisque la « proposition politique » de l’appel aux négociateurs de la COP21 entend peser au nom de « l’injustice sociale et l’exclusion sociale » dont sont victimes « les plus pauvres et les plus vulnérables ».
 

Cardinaux, patriarches et évêques au secours de la COP21

 
On n’a rien vu de tel au synode malgré les crimes dont sont victimes chaque année des millions d’enfants avortés, des jeunes et des familles du fait du rejet de la loi naturelle.
 
Il ne faut pas sous-estimer l’importance de cet appel par rapport à celle du synode, plus visible sur le plan médiatique. L’appel pour le climat inscrit plus avant l’Eglise catholique dans les entreprises de « lutte contre le réchauffement climatique », en pleine continuité avec Laudato si’– d’ailleurs le cardinal Peter Turkson, du Conseil Justice et Paix, venait lui-même de faire quelques jours auparavant le lien entre l’encyclique environnementale et le synode, sur le plan de la pauvreté et de la justice sociale.
 
Qualifié d’« occasion historique » par le cardinal Oswald Gracias, par ailleurs membre du G9 du pape et l’un des promoteurs de la solution du « for interne » pour les divorcés remariés, l’appel réunit pour la première fois « des leaders catholiques représentant toutes les conférences épiscopales régionales et nationales ». La raison ? « Nous faisons beaucoup l’expérience des effets du changement climatique. »
 
Et les effets de la perte de la foi, de l’apostasie silencieuse dans tant de régions du monde ? L’appel, on l’attend toujours…
 

L’adoption d’un accord sur le climat, première urgence morale et éthique ?

 
L’appel des cardinaux, des patriarches et des évêques – signé notamment par le porteur des propositions les plus extrêmes au synode, le cardinal Reinhard Marx, affirme clairement que la lutte contre le « réchauffement » ne suffit pas : « Toute approche écologique doit incorporer une perspective sociale qui prenne en compte les droits fondamentaux des plus défavorisés », dit-il, citant Laudato si’. Il ne prend évidemment en compte aucune contestation de l’existence d’un réchauffement climatique ou de la responsabilité humaine dans d’éventuels changements climatiques.
 
Il l’exprime ainsi : « Il ressort de données scientifiques fiables que l’accélération du changement climatique serait la conséquence d’une activité humaine sans retenue, s’inscrivant dans une certaine vision du progrès et du développement et reposant exagérément sur l’usage des combustibles fossiles. Sensibles aux dégâts qu’elles provoquent, le Pape et les Évêques catholiques des cinq continents appellent à une réduction draconienne des émissions de dioxyde de carbone et d’autres gaz toxiques. »
 

Dix appels éthiques

 
Parmi les dix appels concrets lancés par les prélats, il y a celui à « garder à l’esprit non seulement les dimensions technique mais aussi et surtout éthique et morale du changement climatique », et la reconnaissance « que le climat et l’atmosphère sont des biens communs mondiaux qui appartiennent à tout le monde et sont destinés à tout le monde ». Et tant pis si l’homme n’a jusqu’ici jamais pu empêcher une ondée ou un gel nocturne : on va gérer !
 
L’objectif 4 appelle à « limiter fortement la hausse de la température planétaire et fixer un objectif pour la décarbonisation complète d’ici 2050, de manière à protéger des effets du changement climatique les familles qui sont en première ligne, notamment celles qui vivent dans les îles du Pacifique et sur les régions côtières. » Avec un « seuil de température » à inscrire dans l’accord.
 
Dans le même temps, ils veulent « sortir les gens de la pauvreté » : L’idée centrale est de « mettre un terme à l’ère des combustibles fossiles, de faire progressivement disparaître les émissions produites par les combustibles fossiles et d’offrir à tout un chacun l’accès à une énergie renouvelable, saine, fiable et à un prix abordable ».
 
Tout cela, bien sûr, doit inciter les pays à payer leur part : « Établir des feuilles de routes précises indiquant comment les pays vont pouvoir tenir leurs engagements financiers additionnels, prévisibles et consistants, en trouvant un financement équilibré entre les mesures d’atténuation et les besoins d’adaptation. »
 
Ce dernier objectif montre à quel point l’Eglise se permet dans certains domaines de sortir du domaine spirituel et privé auquel le monde le contraint : et c’est lorsqu’elle agit ainsi, en accord avec le monde, que celui-ci est disposée à reconnaître son autorité morale. Une disposition qui s’arrête là.
 

Anne Dolhein