Il faut vraiment qu’il y ait moins de « BAME » dans les prisons…
sus à la discrimination !

BAME prisons discrimination
 
C’est la dénonciation d’une « partialité », voire d’une « persécution » raciales : les poursuites de certains accusés de couleur devraient être abandonnées ou différées. On ne devrait plus voir leur nom – leur visage ? – pour éviter toute discrimination ouverte, cachée, latente, inconsciente… En bref, il faut qu’il y en ait moins dans les prisons, le taux d’incarcération des BAME (black, Asian and minority ethnic) n’est pas « normal ».
 
Ce sont les conclusions du rapport très critique du député travailliste David Lammy, opéré à la demande de David Cameron, alors premier ministre, en janvier 2016, et soutenu par son successeur, Theresa May. A la fois réaliste dans ses chiffres et pathétique dans ses propositions.
 

« Une plus grande disproportionnalité » entre les groupes

 
« Ma conclusion est que les individus « BAME » sont toujours confrontés à un parti pris, y compris une discrimination manifeste, dans certaines parties du système judiciaire », a déclaré le député dans son rapport. La preuve en est qu’il y a « une plus grande disproportion » dans le nombre de personnes noires dans les prisons en Angleterre et au Pays de Galles qu’aux États-Unis : les Noirs représentent 3 % de la population britannique et 12 % de la population carcérale, contre 13 % et 35 % respectivement, aux États-Unis. Si la population carcérale reflétait la composition de l’Angleterre et du Pays de Galles, il y aurait 9.000 de ces personnes de moins en prison.
 
Une seule explication pour lui : pour les mêmes infractions, certains groupes ont des taux de poursuite plus élevés que d’autres. La Crown Prosecution Service (CPS) avait déjà noté que dans des affaires de viol et d’abus domestique, les accusés noirs et « asiatiques » avaient des taux de poursuite plus élevés. Par exemple, pour ce qui est des injures aux forces de l’ordre, 495 BAME sont incarcérés contre 100 hommes blancs.
 
C’est d’une évidence sans nom : il y a bien un préjugé racial manifeste dans le système de justice pénale britannique, bien qu’il diminue. Et même dans le langage : tenez, pour les BAME, on parle de « gang », mot péjoratif, alors que pour les Blancs, on parle de « groupe »…
 

Les jeunes BAME : 41 % des mineurs en prison !

 
L’accent est tout particulièrement mis sur les jeunes pour qui les chiffres sont, de fait, frappants : en Angleterre et au Pays de Galles, les jeunes noirs sont neuf fois plus susceptibles d’être enfermés que leurs pairs blancs. Et ils sont plus de dix fois plus susceptibles que les garçons blancs d’être arrêtés pour des infractions liées à la drogue : l’année dernière, près des trois quarts des forces de police ont arrêté des moins de 16 ans pour vente d’héroïne ou de cocaïne. Et on ne parle pas des adultes qui sont derrière tous ces réseaux.
 
Bref, en une seule décennie, la proportion de jeunes prisonniers BAME est passée de 25% en 2006 à 41 %… Effarant !
 
Mais ce serait simplement une question de préjugé raciste inconscient ?! Dans ce Royaume-Uni dont certains ont appelé la capitale, « Londonistan » ?! Alors que les aides pour ces minorités sont multiples et en tout genre…
 
David Lammy ne pose absolument pas la question de l’intégration. Ces nouvelles générations des années 2000, nées à l’étranger ou au Royaume-Uni, font tout simplement fi de la loi. « À moins que quelque chose ne change, cette cohorte deviendra la prochaine génération de délinquants adultes » écrit-il. Oui, c’est bien là, l’ennui.
 

Discrimination : il n’y a que ça de vrai

 
Mais ce qu’il propose n’a rien d’une tentative de correction, de rééducation, de réintégration. On parle de discrimination, voyons, pas de remise en cause d’un système biaisé ! Et il a plein d’idées sur la question.
 
Dissimuler les identités : toute information pouvant identifier un individu, y compris son nom, serait expurgée des dossiers afin de permettre au ministère public de prendre des décisions non motivées par préjugé conscient ou inconscient (mais alors, dans la dernière affaire de gang sexuel, à Newcastle, les accusés auraient peut-être été convaincus de crime raciste, si le visage de leurs victimes avaient été aussi caché !)
 
Différer les poursuites : ce système, pionnier dans les Midlands de l’Ouest entre 2011 et 2014, s’appliquerait aux délinquants non récidivistes pour leur proposer « une remise sur le droit chemin » via un programme de traitement etc.
 
Créer une justice « especial » pour les jeunes adultes : la barrière entre mineurs et majeurs est trop raide selon le rapport. Sceller, enfin, les casiers judiciaires : en effet, la moitié des employeurs ne souhaitent pas engager d’anciens délinquants, il devrait y avoir une possibilité pour ces derniers de comparaître devant un juge ou une organisation pour demander que les dossiers soient scellés, i.e. rendus non visibles.
 
Et surtout, cerise sur le gâteau : le rapport appelle à un « pouvoir judiciaire et une magistrature ethniquement représentatifs » d’ici l’an 2025. Alors que 14 % de la population provient des BAME, la proportion, elle n’est que de 6 % au sein de la police et du service pénitentiaire, de 7 % dans le système judiciaire, 11 % parmi les magistrats.
 
Vraiment, en effet, il est temps que ça change.
 

Clémentine Jallais