Nicolas Maduro, l’homme fort du Venezuela, veut annexer l’Essequibo, les 2/3 du Guyana. L’ONU s’implique

Nicolas Maduro Venezuela annexer Essequibo Guyana ONU
 
Après des années de socialisme qui l’ont laissé exsangue, le Venezuela cherche des moyens de se refaire. Nicolas Maduro, l’homme fort du régime, a rallumé en juin un vieux conflit en réaffirmant une vieille revendication territoriale sur le Guyana voisin. C’était le moment : d’importants gisements pétroliers venaient été découverts au large de l’ancienne colonie britannique aux dires d’Exxon-Mobil. Le successeur de Hugo Chavez n’a guère laissé passer que quelques semaines avant de publier un décret visant à annexer la région de l’Essequibo qui couvre les 2/3 du territoire guyanien et abrite un tiers de sa population. Il s’est rendu fin juillet à l’ONU pour exposer l’affaire devant Ban Mi-moon qui entend s’impliquer.
 

Empêcher que l’Essequibo tombe aux mains d’Exxon Mobil

 
Les visées de Maduro, clairement hostiles et porteuses de risque de conflit armé, peuvent compter sur soutien de ses alliés socialistes dans la région : Evo Morales en Bolivie, Rafael Correa en Equateur, Castro à Cuba et bien d’autres Etats d’Amérique latine et centrale sont des appuis potentiels. Le Premier ministre de la Barbade, Freundel Jérôme Stuart, a déjà fait connaître son soutien. Même si le président du Guyana, David Granger, est lui aussi socialiste, la rhétorique de Morales consiste à accuser Exxon Mobil de « déstabiliser » la région et d’appuyer les forces de droite, y compris parmi l’opposition vénézuélienne. Le Guyana est ainsi promu au rang de « pays perfide » ; l’urgence, pour Maduro, est de dénoncer toute l’opération de manipulation de candidats de droite et la conspiration autour du géant pétrolier américain Exxon. On crie au « complot »…
 

Nicolas Maduro veut annexer les 2/3 du Guyana pour le « sauver » d’Exxon Mobil

 
C’est ainsi que la revendication territoriale sur l’Essequibo se présente, dans le discours du socialisme sud-américain, comme une entreprise de « libération » face à l’« impérialisme ». Maduro a multiplié les actes et les prises de parole qui tentent de persuader à la fois son peuple et celui du Guyana voisin qu’il s’agit de persuader de rejoindre le Venezuela dans sa lutte. A la clef : la promesse d’obtenir la carte d’identité du Venezuela, pourtant peu désirable d’un simple point de vue matériel puisque le pays est en proie à de multiples pénuries et que le régime « chavézien » de Maduro est vivement contesté dans la rue par des manifestations à répétition.
 
L’impérialisme que dénoncent les Etats socialistes d’Amérique latine apparaît ainsi, sur le plan domestique, comme un exutoire voire une occasion de s’enrichir. En créant une « Commission présidentielle pour les affaires frontalières » en juin, Maduro a embauché deux militaires à la retraite pour superviser aussi bien celle-ci que « l’Office de sauvetage de l’Essequibo ». Il a beau insister sur la nature « pacifique » de ses revendications – qui se font, en définitive, au nom du socialisme mondial – sa dureté de ton laisse déjà deviner des bruits de bottes.
 

Le Venezuela socialiste en appelle à l’ONU, prêt à s’impliquer

 
La visite de Maduro à Ban Ki-moon, fin juillet, a abouti à la nomination par le secrétaire général de l’ONU d’un « Monsieur bons offices » chargé de visiter les deux pays, en attendant une rencontre annoncée entre Maduro et Granger à New York en septembre.
 
La prise en compte des revendications faites au nom du Venezuela est déjà une concession faite au régime de Maduro. Le conflit, vieux de plus de 100 ans, semblait pourtant avoir été réglé il y a bien longtemps. C’est en 1899 que le Guyana – encore britannique – avait obtenu l’Essequibo à l’issue d’un arbitrage international. Plus de soixante ans plus tard, le Venezuela avait rallumé le conflit en contestant la décision ; en 1966, un traité impliquant le Royaume-Uni, le Venezuela et le Guyana engageait les trois pays à le résoudre de manière pacifique. Peu après, le Guyana obtenait son indépendance, et le différend tomba dans l’oubli.
 
Qu’il soit réactivé aujourd’hui suscite l’ironie de certains opposants au Venezuela qui s’étonnent de voir Maduro s’en inquiéter, alors qu’il a passé de longues années aux côtés de Chavez « sans même s’apercevoir qu’il y avait une dispute territoriale » et que, une fois au pouvoir, il n’a jugé bon d’en parler qu’après la découverte de pétrole – ou alors pour détourner l’attention de son peuple des graves problème du Venezuela, après avoir essayé en vain d’allumer des conflits avec les Etats-Unis d’Obama, puis l’Espagne.
 
La bonne vieille cupidité et la volonté de puissance sont plus que jamais à l’œuvre, précisément dans ces pays socialistes qui prétendent construire la paix entre les peuples !
 

Anne Dolhein