Après François, Obama visite Castro : Cuba, carrefour du mondialisme

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Quelques jours avant la visite du président américain, des affiches souhaitent la « bienvenue » à Barack Obama.

 
Barack Obama en visite officielle à Cuba, c’est le grand retour des Etats-Unis dans l’île 67 ans après la révolution de Fidel Castro. C’est aussi une avancée du mondialisme déjà perceptible lors de la récente venue du pape François.
 
Il ne manque pas un bouton de guêtre à la fête organisée par Cuba pour Obama, son épouse et ses filles. Le grand moment officiel sera bien sûr l’entrevue avec le président Raul Castro et le dîner d’Etat, mais il y a aussi le discours au peuple de Cuba prononcé au Gran Teatro, qui sera retransmis par la télévision cubaine, et, juste après le départ d’Obama, un grand concert gratuit des Rolling Stones. Tout le décorum post moderne occidental. Jamais dans leurs rêves – ou leurs cauchemars, selon leur opinion politique – les habitants de Cuba n’avaient pensé voir un tel spectacle. Comme le disait un sexagénaire interrogé par La Presse de Montréal : « Depuis que je suis petit j’entends parler de la Révolution, c’était surtout contre les Etats-Unis ». Maintenant, ce sera avec. La révolution par le haut, la révolution des grands. Et cette révolution va avancer désormais à pas de géant, après la période de glaciation caractéristique des dictatures soviétiques. Avec le développement, le dégel, la réconciliation et les droits de l’homme promis par les médias, la révolution va apporter, à travers le rapprochement Est-Ouest, le mondialisme dont Cuba est aujourd’hui un carrefour à la mode.
 

La visite historique d’Obama chez Castro

 
Pour apprécier cet événement de portée historique (le dernier président américain qui mit les pieds à Cuba fut Coolidge en 1928), il faut rappeler quelques évidences. D’abord, les Etats-Unis ont mis la main sur Cuba à la fin du dix-neuvième siècle, y fomentant une crise en spéculant sur le sucre pour en chasser l’Espagne par une brève guerre navale. Depuis, l’île fut leur protectorat, et la révolution de Castro en 1959, nationale communiste, fut aussi une réaction de l’élite hispanophone blanche contre le gringo impérialiste. Aujourd’hui plus de gringo, le « coloured » Obama, qui a retenu les leçons de son maître trotskiste Alinski, capte la sympathie des masses « coloured » de Cuba pour faire sa révolution (la présence de ses filles, très « cubaines », est révélatrice).
 
Un aspect de celle-ci est le socialisme. Bien sûr les affaires vont reprendre, la chaîne hôtelière Starwood a déjà obtenu l’autorisation de s’installer, mais le profit, les multinationales et l’hyperlibéralisme (words, words, words, aurait dit Hamlet), n’empêchent ni le processus, ni celui qui l’enclenche, Obama, de pencher vers le socialisme – Raul Castro l’a fort bien compris. Obama a entrepris aux Etats Unis une politique qui porte toutes les marques du socialisme : en matière économique l’Obamacare, bien sûr, mais aussi la soumission aux ukases du mondialisme écologique, une politique dite « sociétale » favorable au lobby LGBTI et au planning familial. Et, en politique étrangère, où il rencontre de fortes oppositions, un début de renversement des alliances, avec d’une part le rapprochement avec l’Iran et de l’autre un relâchement des liens avec l’Arabie saoudite et Israël.
 

Comment le traité transpacifique prépare le mondialisme

 
Sans doute le socialisme d’Obama n’est-il pas celui de Lénine, il y a un peu moins de soviets et un peu plus d’électricité, mais il repose lui aussi sur le devoir de redistribuer les richesses selon un plan imposé par la morale, comme la gauche et la maçonnerie le préconisent. L’un des dossiers que l’on devra suivre est l’éventuelle incorporation de Cuba dans les zones de libre échange organisées par les Etats Unis avec l’Amérique latine, Mercosur et Alena. Le libre échange est la manière anglo-saxonne, d’ailleurs conforme à la pensée de Marx, de faire la révolution dans le monde. Obama négocie deux grands traités, le traité transatlantique (TAFTA) et le traité transpacifique (TPP) qui auront pour effet non seulement de faciliter les échanges selon les intérêt des Etats-Unis, mais, pour reprendre les mots de John Kerry, le Secrétaire d’Etat américain, de faire en sorte que tous les signataires respectent « les normes les plus élevées en matière de protection des personnes, de commerce ouvert, transparent, responsable » En d’autres termes, l’Amérique se fait l’institutrice d’une éthique et d’une politique globale, le mondialisme normatif. Ces traités imposent en effet des règles supranationales, grignotent les droits des nations, accordent des avantages exorbitants aux multinationales et instaurent des tribunaux internationaux aux pouvoirs non moins exorbitants pour arbitrer d’éventuels conflits.
 

A travers Cuba Obama tend la main à la Chine et la Russie

 
Qu’il s’agisse bien de mondialisme d’esprit socialiste, et non de simple impérialisme US hyperlibéral, l’histoire du TPP le montre. Le TPP, le traité transpacifique, rassemble aujourd’hui douze pays signataires qui représentent quelque 40% du PIB mondial, Australie, Brunei, Canada, Chili, Etats-Unis, Japon, Malaisie, Mexique, Nouvelle-Zélande, Pérou, Singapour, Vietnam. Notons déjà la présence du Vietnam, qui n’est pas un modèle de libéralisme. Pour obtenir le vote d’un congrès réticent en faveur de ce traité dont les clauses sont loin d’être enthousiasmantes pour les producteurs américains, Obama a prétendu vouloir contenir la puissance chinoise. Le Los Angeles Times l’écrivait le 4 mars 2015, « Le président Obama espère obtenir la signature du traité transpacifique en jouant sur la peur des Chinois ». C’est là que la rhétorique mondialiste est astucieuse, car le but est précisément d’associer la Chine communiste – et la Russie – à l’ensemble. Le 2 novembre 2015 en visite officielle à Astana, au Kazakhstan, John Kerry invitait la Chine et la Russie à adhérer au TPP, et sa conférence de presse était mise en ligne par le Département d’Etat américain. Il ne faisait d’ailleurs qu’officialiser une recommandation antérieure (2014) du Council for Foreign Relations, le think tank dont l’influence sur la politique étrangère des Etats Unis est déterminante.
 

L’Est et l’Ouest convergent vers le mondialisme

 
Ces invitations sont écoutées avec faveur du côté chinois. Le 26 octobre 2015, le Study Times, journal proche du PC chinois, publié par l’école centrale du parti qui contribue à la formation de ses cadres dirigeants, a estimé que la Chine devrait signer le TPP le moment venu, « le TPP et la direction des réformes chinoises sont en phase ». Et Vladimir Poutine lui-même, que l’on présente comme intraitable et diabolisé, a dit à propos du TPP : « Je crois que l’absence de deux grands acteurs régionaux comme la Russie et la Chine dans sa composition ne contribuera pas à promouvoir l’établissement d’une coopération commerciale et économique efficace ».
 
L’ambition d’Obama et du mondialisme dans cette affaire dépasse le TPP, et la réponse russo-chinoise aussi. A terme, il existe un projet de libre échange transpacifique beaucoup plus vaste, désigné sous le nom de Free Trade Area of the Asia-Pacific (FTAAP) dans laquelle tous les Etats de la zone doivent entrer. C’est à lui que Vladimir Poutine pensait en ajoutant : « Les accords de libre échange ne doivent pas fragmenter le système d’échanges multilatéral ». Dès le 22 décembre 2014, le China Daily, autre journal exprimant l’opinion de la direction du Parti communiste chinois, appelait la Chine à entrer dans la FTAAP.
 

A Cuba, François a donné sa bénédiction à Castro et Obama

 
Ce développement un peu long était nécessaire pour comprendre ce qui est en train de se passer à Cuba, et en quoi Obama n’est pas seulement le président des Etats-Unis, mais aussi le meilleur agent du mondialisme à la Havane. Il a pour ambition de « rendre irréversible » les nouvelles relations entre Washington et le gouvernement de Raul Castro, fidèle à la stratégie qui règle toutes les avancées de la gouvernance mondiale et des réformes dites sociétales soufflées par la maçonnerie, le fameux effet cliquet : il interdit à ceux qui viennent au pouvoir ensuite de revenir en arrière, même s’ils ont été élus par la droite. Obama est décidément un président cliquet.
 
Notons pour la bonne bouche que la première visite d’Obama en arrivant à Cuba dimanche soir a été pour la cathédrale de La Havane, ce qui surprend de la part du chef d’une puissance traditionnellement ennemie du Vatican et de la religion catholique. Mais l’on sait que les papes, depuis Jean-Paul II, travaillent à faire rentrer Cuba dans la communauté des nations fréquentables, et François partage cette stratégie. Et l’on sait que le cardinal Ortega a beaucoup fait pour préparer la rencontre Raul Castro Obama, comme il avait naturellement beaucoup travaillé à la visite du pape François à Cuba le mois dernier. Il faut dire que ce pape est sud-américain et qu’il a sucé le lait de la théologie de la libération. Il est donc fort sensible au sirènes du mondialisme, et grand partisan de la révolution par les migrations, au Mexique comme en Europe. Comme Obama qui a régularisé les clandestins à tour de bras. Tout se passe donc comme si le pontife romain et le chef métissé d’islam d’une puissance protestante communiaient dans le mondialisme. Chacun aura remarqué que la prochaine visite de celui-ci est l’Argentine, le pays natal du pape François.
 

Pauline Mille