DRAME Léviathan Cinéma ♥♥

leviathan
 
Le Léviathan c’est ce monstre mentionné dans un des passages les plus poétiques de l’Ancien Testament, à la gloire de Dieu, dans le livre de Job. Cette gloire est chantée à travers les beautés de la création ; mais le mot qui le désigne est aussi, en hébreu, celui qui nomme le serpent de la Genèse… Ce dernier est souvent assimilé à des baleines, d’où des squelettes de baleines échoués au bord de la Mer Blanche présents dans le film et sur l’affiche de Leviathan. Le monstre qui engloutit…
 
Le Job de ce Léviathan est un garagiste d’une petite ville portuaire perdue dans le Grand Nord russe. Il risque de tout perdre, à commencer par sa maison, en voie d’expropriation au nom d’un intérêt public nébuleux, et bien d’autres choses auxquelles il tient beaucoup, que l’on ne révélera pas ici. Le film se veut portrait de la société russe d’aujourd’hui – il a d’ailleurs provoqué un mini-scandale en Russie du fait de l’alcoolisme généralisé des personnages masculins.
 
Dans Léviathan, microcosme joliment décrit, tout le monde se connaît. Et les relations conflictuelles en sont adoucies. La corruption est décrite avec finesse et dans le concret : le maire se permet des interprétations larges des lois et règlements, avec l’aide de son ami le procureur, ou au besoin, du commissaire. Il sait jusqu’où ne pas aller trop loin dans l’injustice pour éviter d’attirer l’attention des autorités régionales qui pourraient s’offrir le luxe de le faire servir d’exemple. Pire : ses électeurs risqueraient de ne pas le reconduire aux élections l’année suivante – une défaite qui le mènerait certainement en prison du fait des enquêtes inévitables sur sa gestion.
 
On voit l’Eglise orthodoxe coopérer par principe avec tous les pouvoirs en place, suivant son interprétation de Saint Paul. En Russie, cet aspect du film n’a pas plu, nonobstant les exemples historiques. Mais un maire pécheur, qui va à la messe en famille, n’est-ce pas plus supportable qu’un communiste athée ou un musulman persécuteur ? Portrait peu flatteur d’une microsociété russe, le film étonne de véracité. Dommage qu’on y ait concédé au goût du jour en ajoutant complaisamment quelques rares scènes de nudité qui décidément ne s’imposaient pas.