La peur de raviver l’extrême-droite fait changer l’Europe de ton face aux migrants : on revoit la question syrienne !

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Il y a eu des quotas, plus ou moins acceptés, des envolées lyriques et des retraits prudents. Mais les couronnes de bons sentiments et de valeurs républicaines et maçonniques ont cédé la place à une crainte beaucoup plus tangible. Et si, en laissant rentrer ces flux de migrants, de « réfugiés », en réalité d’immigrés illégaux, de plus en plus nombreux, on favorisait, non pas seulement la bonne conscience humaniste, mais aussi l’immonde extrême-droite en Europe ?! Certains dirigeants européens semblent avoir cédé au réalisme pour une meilleure cause : le combat contre les xénophobes. Dans ce cas, unique, on peut – que dis-je – il faut se préoccuper de contrôler plus sérieusement les frontières et même – sidérant de bon sens – aller voir du côté du foyer originel majeur, la Syrie, comment faire cesser au plus vite l’hémorragie. États-Unis et Russie entrent désormais en ligne de compte. La question syrienne pourrait trouver issue plus rapidement que prévu…
 

Il faut « reprendre le contrôle de nos frontières extérieures » Donald Tusk

 
Deux têtes de l’administration européenne ont orienté de façon nouvelle le débat, ces derniers jours, parmi les dirigeants réunis en sommet à Bruxelles. La césure entre partisans de l’ouverture à tout crin et tenants du verrouillage à tour de bras pourrait s’en trouver changée.
Alors qu’on nous bassinait de chiffres restreints, de quotas légaux, Donald Tusk, président du Conseil européen, a enfin avoué que la plus grande vague de migrants faisant leur chemin vers l’Europe était « encore à venir » et que « le sens de l’ordre » en Europe était menacé.« Nous devons mettre fin à la politique de portes et des fenêtres ouvertes », a -t-il déclaré ! « La quasi-totalité d’entre eux se sentent invités en Europe (…), la question que nous devons nous poser ce soir est de savoir comment reprendre le contrôle de nos frontières extérieures ».
 
Nous sommes loin de « la fidélité aux valeurs européennes » d’il y a encore quelques semaines…
 

Pas d’extrême-droite en Europe !

 
Ce tout frais réalisme étonne et pose question. La réponse, peut-être faut-il aller la chercher du côté du vice-président de la Commission européenne, Frans Timmermans, qui a dit jeudi tout haut ce que beaucoup pensent tout bas, avec effarement : ne pas traiter « correctement » la crise des migrants, c’est ouvrir la porte à l’extrême-droite en Europe.
 
Oui, les frontières de l’Union européenne ont besoin d’une meilleure protection, oui, il faut s’assurer que les personnes qui ne disposent pas du droit d’asile soient renvoyées rapidement. Car, « si nous ne sommes pas en mesure de trouver des solutions durables, vous verrez une poussée de l’extrême droite à travers le continent européen. »
 
C’est ce qu’a confirmé, ce même jeudi, le service de renseignement de la Norvège, questionné sur une éventuelle infiltration d’islamistes parmi les migrants qui arrivent par milliers dans le pays. « Les demandeurs d’asile liées à l’islam radical ne sont pas une préoccupation principale du PST à court terme » : le flux croissant de demandeurs d’asile pourrait surtout « faire exploser les cercles d’extrême droite »… Le problème est là !
 
En Pologne, où un changement de gouvernement doit avoir lieu le mois prochain, c’est ce qui est craint. La droite nationaliste y est pressentie pour déloger les conservateurs en place. Elle a même promis de revenir sur la décision de l’actuel gouvernement qui a rompu, mardi, avec ses alliés d’Europe centrale, en votant pour le principe des quotas…
 

Les solutions aux migrants

 
De solutions, il y a toujours l’argent : les dirigeants de l’UE ont proposé 1 milliard d’euros pour renflouer les pays de transit ou riverains de zones de guerre au Moyen-Orient, dans le but premier d’empêcher les réfugiés de vouloir faire le voyage vers l’Europe.
 
La Turquie, principal point de passage des Syriens, a semblé aussi, dans un premier temps, une issue possible. Mais Ankara exige un prix financier élevé en contrepartie de sa bonne volonté – dont on peut toujours douter. De plus, le Premier ministre turc a fait savoir mercredi à l’UE que le pays exigeait une zone tampon d’exclusion aérienne dans le nord de la Syrie, à toucher la frontière turque. Ce qui aurait pour effet collatéral, avantageux pour elle, de coincer les milices kurdes détestées (qui se battent contre l’État islamique) et permettrait également à Ankara de commencer à renvoyer chez eux les 2 millions de réfugiés syriens qu’elle héberge… En définitive, une impasse.
O stupéfaction, Merkel a fini alors par regarder vers le foyer de migration lui-même et a déclaré au parlement allemand que la situation des réfugiés ne pouvait être traitée qu’en abordant les causes de l’exode…
 

Les positions occidentales revoient la question syrienne

 
Et le discours européen semble tout d’un coup avoir changé. Angela Merkel est allé jusqu’à déclarer que le dirigeant syrien devrait être impliqué dans les pourparlers.
 
Outre-atlantique, c’est la même évolution qui semble s’opérer. Un haut conseiller à Damas vient de confier l’existence d’un accord « tacite » entre les États-Unis et la Russie : « le climat international actuel se dirige vers la détente et vers une solution à la crise en Syrie ».
 
Moscou a accru son soutien militaire, ces dernières semaines, en envoyant soldats, mais aussi avions de combat et artillerie. Elle a même annoncé hier qu’elle opérerait tout prochainement des exercices navals et, selon Bloomberg, se préparerait à des frappes aériennes unilatérales contre l’État islamique si les États-Unis rejetaient sa proposition d’unir leurs forces… Cela signifierait que les deux anciens ennemis de la guerre froide pourraient se retrouver l’un en face de l’autre – ce qui n’entre pas dans le plan américain.
 

Des « moyens de coopérer » en Syrie : alors, avec ou sans Assad ?

 
Le chef du Pentagone a donc confirmé jeudi que les États-Unis et la Russie pourraient trouver des « moyens de coopérer » sur la crise en Syrie. Reste juste à s’assurer, selon lui, du but commun qui est de trouver une solution à la guerre civile et d’élaborer une « transition politique ».
 
Quant au destin du président syrien, rien n’est moins clair. Dans un entretien à une chaîne américaine diffusé jeudi, Poutine, soutien du régime depuis des décennies, a réaffirmé son intention de sauver Assad. « Toutes les actions allant dans l’autre sens – qui visent à détruire le gouvernement légitime (syrien) – vont créer une situation qu’on a déjà observé dans d’autres pays de la région ou dans d’autres régions, par exemple en Libye, où toutes les institutions étatiques ont été désintégrées (…) Il n’y a pas d’autre solution à la crise syrienne que de renforcer les structures gouvernementales efficaces et de les aider dans la lutte contre le terrorisme. »
 
Mais l’agence Bloomberg a cité, mercredi, une source expliquant que le président russe a proposé une « voie parallèle » d’action militaire conjointe accompagnée par une transition politique sans Assad, point qui demeurait crucial pour les États-Unis, mais aussi leurs alliés. De manière similaire, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, critique féroce de Bachar al-Assad, a suggéré jeudi pour la première fois que le président syrien pourrait avoir un rôle à jouer dans la transition politique à venir – c’était le lendemain de son entretien avec Poutine – mais a tout de suite précisé que le Moyen-Orient ne pouvait continuer avec lui.
 
Se jouerait-on d’Assad ? Les présidents russe et américain doivent se rencontrer lundi, à New York.
 
Clémentine Jallais