Le scandaleux mensonge du pouvoir socialiste sur Alstom

Alstom mensonge pouvoir socialiste
(Jérôme Bosch, L’Escamoteur.)

 
L’affaire Alstom est emblématique des errances de l’étatisme à la française, que le scandaleux mensonge du pouvoir socialiste ne parvient pas à masquer. Cette société vient d’annoncer sa volonté de transférer les activités de construction de locomotives et motrices depuis son site historique de Belfort vers celui de Reichshoffen, en Alsace. Belfort ne réaliserait plus que des opérations de maintenance, voyant ses effectifs passer de 480 à 400 par réaffectation des personnels sur les autres sites français de groupe. Immédiatement, le pouvoir socialiste a sauté sur l’occasion pour accabler la direction du groupe et convoquer son PDG, Henri Poupart-Lafarge, X-Ponts et MIT, qui a succédé à Patrick Kron après que ce dernier eut finalisé la cession de ses activités production d’électricité à General Electric en début d’année. Le message explicite : c’est une décision unilatérale, inacceptable et l’Etat n’était pas au courant. Mensonge pitoyable : le jeu de bonneteau est destiné à masquer ses responsabilités.
 

L’Etat ne pouvait pas ne pas savoir

 
Personne n’a été dupe. L’Etat possède 20 % des parts d’Alstom, étant ainsi son premier actionnaire représenté au conseil d’administration avant Bouygues, qui lui a rétrocédé les deux tiers de ses droits de vote l’an dernier. Un tel actionnaire ne pouvait pas ne pas être au courant des difficultés d’un des sites emblématiques du constructeur ferroviaire. Les syndicats ont pour leur part averti de longue date le pouvoir politique de la baisse de charge de l’usine de Belfort au-delà de l’année 2018. Année qui devrait donc voir sa fermeture.
 
La construction ferroviaire est une activité intimement liée aux pouvoirs politiques. Le chemin de fer est un domaine fortement capitalistique qui ne peut se développer, quel que soit le type de régime, libéral ou étatiste, sans la puissance publique. Alstom a réussi à l’international dans ces deux cas de figure. Jadis en Russie en reprenant Transmasholding, gros producteur d’engins moteurs pour toute l’ex-URSS, ou en Italie en reprenant Fiat Ferroviaria. Tout récemment aux Etats-Unis en signant le mois dernier pour la construction de 28 nouvelles rames pendulaires à vitesses élevées, les Avelia Liberty, pour équiper le corridor Nord-Est Boston-Washington, contrat s’élevant à 1,8 milliards d’euros.
 

Alstom face au handicap d’une économie soumise au pouvoir socialiste

 
Alstom est présent au Royaume-Uni, dans la péninsule arabique, en Chine, en Afrique du Nord avec le TGV marocain ou ses tramways Citadis (qui circulent à Rabat, Casablanca, Oran ou Tunis), ou encore en Inde, Pologne, Australie, Argentine, au Canada, en Afrique du Sud… si l’on s’en réfère à ses plus récents contrats. Au premier trimestre de l’exercice en cours ses ventes, recentrées sur le seul ferroviaire, ont progressé de 9 % à 1,7 milliards d’euros.
 
Mais voilà. Les Etats exigent souvent que la construction des trains soit au moins pour partie réalisée sur leur territoire. C’est en particulier le cas des Etats-Unis et de leur Buy American Act. Les Avelia Liberty seront ainsi produites à 95 % outre-Atlantique, dans l’usine Alstom de Hornell (Etat de New York). Les commandes étrangères auprès d’Alstom, en particulier pour les engins moteurs, se traduisent donc souvent par de l’activité supplémentaire pour des usines situées dans les pays acheteurs. Les 150 rames régionales commandées par Trenitalia en Italie feront par exemple principalement travailler les usines transalpines d’Alstom. Cette tendance est moins nette pour les tramways Citadis, permettant à leur site de construction, l’usine d’Aytré près de La Rochelle, de conserver un plan de charge élevé.
 

La désastreuse politique ferroviaire du pouvoir

 
Les cris d’offraie du pouvoir socialiste sont d’autant plus insupportables que les difficultés du site de Belfort lui sont principalement imputables. D’abord parce que les coûts de production y sont plus élevés que sur la plupart des sites étrangers, en raison des contraintes fiscales et sociales françaises. Ensuite parce que, depuis le début du quinquennat Hollande, le ferroviaire a été systématiquement délaissé. Les fermetures de lignes classiques s’accélèrent (Clermont-Saint Etienne, Aurillac-Brive, Clermont-Brive…), asséchant mathématiquement les besoins des régions en nouveau matériels. L’activité fret de la SNCF est exsangue, laissant dans les dépôts des centaines de locomotives inutilisées.
 
Enfin parce que l’ouverture des TER à la concurrence qui permettrait une relance de l’offre et des commandes de matériel roulant, est bloquée par un pouvoir soumis aux syndicats de la SNCF qui s’accrochent à un modèle dont le coût de production est supérieur de 30 % à celui de ses homologues. Rappelons que la SNCF est un établissement public dont le conseil d’administration est majoritairement composé de représentants des ministères.
 

Les cars des « pauvres » du « courageux » Macron

 
Plutôt que d’affronter les syndicats de cheminots, le « courageux » Emmanuel Macron a préféré déréguler les autocars des « pauvres », toujours largement déficitaires au demeurant, rendant encore plus improbable le maintien des liaisons ferroviaires les plus fragiles dont l’offre est dégradée voire sabotée par SNCF-Mobilités, en particulier pour les trains Intercités. Dans ce dernier domaine, la commande pour remplacer les rames Corail, attendue par Alstom qui n’est même pas sûr de les obtenir, tarde à venir.
 
Le scandaleux sous-investissement passé sur le réseau classique pousse SNCF-Réseau à augmenter ses droits de circulation, torpillant la rentabilité de l’activité TGV. Et l’accord de recherche sur le TGV du futur passé entre SNCF et Alstom signé ces dernières semaines ne regarnira pas les chaînes de montage avant la prochaine décennie. Les restrictions budgétaires imposées aux collectivités et le blocage, en matière de transport public dans les villes de province, de tout nouvel appel à projets accompagné de crédits de la part de l’Etat, ralentit les mises en service de nouvelles lignes de métro ou de tramways. Seule l’Ile-de-France et son pharaonique Grand Paris nourrit encore les commandes de matériel français auprès d’Alstom dans ses usines hexagonales. Quant à l’idée de pousser la SNCF ou la RATP à commander du matériel dont elles n’ont pas besoin, ce serait une opération de cavalerie tout simplement scandaleuse.
 

Le mensonge du pouvoir

 
Plutôt que de critiquer la rationalisation de l’appareil de production d’Alstom en France, une des conditions de ses futurs succès ailleurs, le régime en place sauverait ce qui lui reste d’honneur en commençant par balayer devant sa porte. Et en cessant de faire censurer les décisions d’entrepreneurs compétents par de hauts fonctionnaires ou politiciens énarques n’ayant jamais pris d’autre risque que de passer les concours de la haute fonction publique.
 

Matthieu Lenoir