DRAME Hippocrate
Cinéma ♠

hippocrate
 
Hippocrate propose de suivre le parcours d’un apprenti médecin, un interne, à l’hôpital public. Le problème majeur est que le film hésite entre une approche documentaire, et une narration, doublée d’un message politique et syndical. L’indéniable aspect document d’Hippocrate, très présent durant la première demi-heure du film, intéresse véritablement. Le spectateur s’identifie facilement au novice, et s’imagine devoir donner des consultations, réaliser des actes médicaux simples – en apparence seulement –, à commencer par piquer la seringue exactement au bon endroit et à la bonne profondeur. La vie d’un grand hôpital est plutôt bien présentée, avec ses souterrains à couloirs interminables pour les blanchisseries et poubelles, ses services médicaux multiples et leur lutte permanente pour s’attribuer ou au contraire refouler les patients, qui cumulent les pathologies, et sont à affecter selon la pathologie principale. Le dévouement, parfois émouvant, indéniable, du personnel médical face à la détresse et la souffrance humaine mérite la forme d’hommage rendu. Toutefois, ce n’est pas une découverte, les internes multiplient entre eux les plaisanteries et dessins obscènes, ce dont on ne les félicitera pas.
 
L’intrigue, en revanche, ne tient pas la route. Le jeune interne ne possède pas les nerfs nécessaires pour ce difficile métier. D’où d’ailleurs une insistance désagréable sur son effondrement psychologique. Cela existe sûrement, les outrances en moins. Mais par un improbable miracle, après des actes sur le lieu de travail relevant de la psychiatrie lourde, il se retrouve quand même médecin en hôpital, simplement déplacé, extravagance improbable, du moins l’espère-t-on.
 
Le récit est accompagné de la propagande trotskyste du syndicat SUD : il faudrait plus de « moyens » pour l’hôpital. Il faudrait surtout faire cesser des gaspillages formidables, illustrés par le film lui-même à travers le cas d’un acharnement thérapeutique, inhumain et évidemment très coûteux. Le comptable, qui veut équilibrer le budget, son devoir le plus strict, est présenté comme l’ennemi de classe à abattre. Les médecins étrangers, en effet surqualifiés pour le travail qu’on leur demande, exploités peut-être en un sens, voient claironner leurs revendications : un statut supérieur, avec doublement du salaire, et venue automatique de toute la famille encore au pays… Non, le devoir d’un médecin algérien, colombien, sénégalais, consiste avant tout à aider les malades de son pays, bien assez nombreux. Cette morale facile d’extrême-gauche d’Hippocrate exaspère.

Octave Thibault